Ce début dystopique sur le vieillissement et l'euthanasie au Japon est émouvant et discret
Réal : Chie Hayakawa. Japon/France/Philippines/Qatar. 2022. 112 minutes.
DansPlan 75, un Japon du futur proche offre à ses citoyens âgés la possibilité de s'euthanasier, un scénario troublant qui aboutit à un drame méditatif évoquant le regret, la solitude et la bureaucratie sans âme. Le premier long métrage de Chie Hayakawa n'a pas le sombre courant dystopique des films de science-fiction d'autrefois tels queVert Soylant, et pourtant, sous sa douce surface se cache un commentaire bouleversant sur la façon dont les sociétés se débarrassent de ceux qu’elles jugent n’avoir plus de valeur.
Plan 75peut sembler être une question de vieillissement, mais plus précisément, il s'agit de l'importance de la communauté.
En première à Un Certain Regard,Plan 75plaira davantage aux foules d'art et d'essai qu'aux fans de genre, mais toute personne intéressée par une science-fiction réfléchie devrait rechercher cette image modeste et touchante. Quelques belles performances – notamment de Chieko Baisho dans le rôle d'une vieille veuve face à la fin – élèventPlan 75's une indignation silencieuse.
Baisho incarne Michi, qui travaille comme femme de ménage dans un hôtel avant d'être licenciée, craignant de ne pas pouvoir subvenir à ses besoins et de devoir s'inscrire au Plan 75 du Japon, qui permet aux personnes de 75 ans et plus d'être euthanasiées, en recevant une petite somme pour faire du bénévolat. . MaisPlan 75se penche également sur deux autres personnages : Hiromu (Hayato Isomura), un vendeur de Plan 75 confronté à une crise de conscience ; et Maria (Stefanie Arianne), une jeune mère qui accepte un emploi subalterne dans l'entreprise pour aider à payer l'opération chirurgicale qui a sauvé la vie de sa fille.
Hayakawa élargit son court métrage de 2018 pour s'interroger sur les répercussions sociétales qui résulteraient d'une telle politique, qui dans le film est en place depuis environ trois ans.Plan 75révèle finalement quelques secrets troublants sur le programme, mais ceux-ci s'avèrent moins insidieux que les réalités quotidiennes capturées par la caméra calme de Hayakawa. En effet, chacun des trois protagonistes du film sera, à sa manière, impacté par l'attitude intolérante de la culture envers les personnes âgées.
Ces intrigues parallèles évoluent souvent de manière discrète. Michi, qui n'a pas de famille, se tourne vers Yoko (Yuumi Kawai), une agente téléphonique du service client de Plan 75 qui s'implique émotionnellement dans la vie de la femme plus âgée. Pendant ce temps, Hiromu, qui croit de tout cœur à la fin de la vie par compassion du Plan 75, repense cette position une fois que son ex-oncle (Taka Takao) se rend dans son bureau pour chercher à mettre fin à ses jours. Quant à Maria, le caractère macabre du travail qui l'attend ne devrait pas être gâché, mais cela témoigne du mépris insensible des morts qui se produit même dans les sociétés dites civilisées.
Plan 75n'a jamais pitié de ses personnages âgés, et Baisho est superbe dans le rôle d'une femme dont le sentiment croissant d'inutilité commence à saper sa force vitale. Des plans statiques poignants de Michi de dos, regardant par la fenêtre de son appartement, contemplant la futilité de tout – ou peut-être même sautant vers sa mort – en disent long sur la terreur et l'isolement de la vieillesse. Les expressions fatiguées de Baisho apportent une forte angoisse au rôle.
Isomura et Arianne ne sont pas aussi efficaces, en partie parce que leurs personnages ne sont pas aussi profondément développés, mais ces perspectives plus jeunes sont cruciales à juxtaposer à l'épreuve de Michi. Le fait que Maria ait une fille malade apporte une amère ironie à la situation : la mort est une réalité à laquelle chacun doit faire face, quel que soit son âge.
Hayakawa ne s'attarde pas sur la logistique de sa prémisse dystopique – et elle ne s'inquiète pas non plus de se livrer aux conventions du thriller alors que nous atteignons les derniers rouleaux. Il s’agit plutôt d’une histoire discrète et résignée sur la façon dont les pays et les entreprises suivent leurs propres intérêts plutôt que d’aider ceux qui en ont le plus besoin.Plan 75peut sembler être une question de vieillissement, mais plus précisément, il s'agit de l'importance de la communauté – l'espoir que quelqu'un se souviendra de nous après notre départ.
Sociétés de production : Loaded Films, Urban Factory, Happinet-Phantom Studios, Dongyu Club, WOWOW, Fusee
Ventes internationales : Ventes Urbaines,[email protected]
Producers: Eiko Mizuno-Gray, Jason Gray, Frédéric Corvez, Maéva Savinien
Scénario : Chie Hayakawa, d'après une histoire de Chie Hayakawa et Jason Gray
Direction artistique : Setsuko Shiokawa
Montage : Anne Klotz
Photographie : Hideho Urata
Musique : Rémi Boubal
Acteurs principaux : Chieko Baisho, Hayato Isomura, Stefanie Arianne