Nicolas Philibert dresse le portrait de deux unités psychiatriques parisiennes dans le deuxième d'une trilogie prévue après "On The Adamant"
Dir. Nicolas Philbert. France 2024. 143mins
Le documentariste vétéran Nicolas Philibert se concentre sur l'hôpital Esquirol de Saint-Maurice près de Paris ; en particulier, deux unités psychiatriques portant le nom du philosophe et mathématicien islamique Avveroes et de l'icône américaine des droits civiques Rosa Parks. Le deuxième d'une trilogie projetée après celle de l'année dernièreSur l'inflexible, c'est un film plus austère, aux énergies beaucoup plus introverties – avec des contenus parfois tout à fait déchirants.
Un travail extrêmement abouti et convaincant
Sur l'inflexiblea mérité l'Ours d'or de Berlin, sûrement en partie parce que le film était si édifiant : une représentation affirmative et compatissante d'un établissement de santé psychiatrique parisien et de sa patience. Célébrant une approche éclairée et culturelle des soins psychiatriques,Sur l'Adamantétait dans le meilleur sens du terme – si une telle chose est imaginable – un film réconfortant sur la maladie mentale.ÀAverroès & Rosa Parks,dont la première a eu lieu à la Berlinale Special, est une montre plus résistante que son prédécesseur, mais une œuvre extrêmement accomplie et convaincante, le dernier chapitre d'une formidable carrière documentaire qui comprend des œuvres telles queEtre Et Avoiret étude clinique psychiatrique de 1997Chaque petite chose.
Le film commence par une prise de vue panoramique par drone scrutant la construction en forme de grille du vaste bâtiment, avec un membre du personnel regardant les images et notant que, comme tant de bâtiments institutionnels français de l'époque, il ressemble à une prison ; en effet, l'édifice, construit à l'origine au XVIIIe siècle, date d'une époque où les établissements psychiatriques s'apparentaient davantage à des prisons.
OùSur l'inflexiblemettant en lumière les activités culturelles collectives d'un centre de jour en bord de Seine, cette suite est constituée en grande partie d'un ensemble de consultations entre membres du personnel et patients résidents (dont certains sur le point de sortir, et à qui les médecins conseillent d'utiliser les ressources de l'Adamant). ). L'appareil photo discret de Philbert s'en tient généralement à un schéma de prise de vue inversée en format moyen, avec des gros plans occasionnels ; une séquence montre une femme parlant apparemment à quelqu'un derrière la caméra, mais le film maintient en grande partie son détachement d'observation, écoutant les récits des patients sur leurs expériences, ainsi que les questions et commentaires des médecins.
SiSur l'inflexibleprésenté comme un ensemble d'études de personnages fascinantes, le détachement de sa suite offre davantage un inventaire des variétés de maladies mentales. Les dialogues entre patients et soignants – qui semblent éminemment empathiques, bien qu'à des degrés divers – révèlent le type de stress et de défis auxquels sont confrontés les malades mentaux, tant dans le monde en général qu'au sein du système psychiatrique dans lequel ils sont souvent douloureusement conscients d'être accueillis. été absorbé.
Parmi les personnes que nous rencontrons se trouve Monsieur Obadia, sur le point d'être libéré, à qui on propose une colocation temporaire dans la ville, mais dont les inquiétudes – concernant sa propre observation religieuse en tant que juif et envers le gouvernement français et sa politique de laïcité – les amènent à lui de répondre à chaque suggestion par des objections anxieuses. Il y a ensuite Olivier, un jeune homme ayant des difficultés d'apprentissage, confus quant à ses relations familiales, persuadé que les filles des autres sont les siennes et que son père et son grand-père décédés sont présents à l'hôpital sous la forme d'autres personnes (bien qu'en même temps temps, il semble pleinement conscient de la véritable identité de chacun).
S'il y a un individu dans ce film qui fascine particulièrement, c'est bien Noé, un homme d'âge moyen, aperçu pour la première fois en train de faire de brefs commentaires dans une poignée de scènes de discussion de groupe. Vers la fin du film, Noé a un entretien individuel avec deux membres du personnel et explique son histoire de juif bouddhiste, d'enseignant idéaliste de l'enseignement supérieur souffrant d'épuisement professionnel, de dissident du système académique français et de « mégalomane » avoué. et « caméléon métapsychique » qui s'identifie très étroitement aux penseurs qu'il lit (« Je suis devenu Nietszche »). Non que ce soit l'intention de Philibert, mais Noé, comme plusieurs habitués de l'Adamant, aurait facilement pu faire l'objet de reportages entiers.
Alors que la longue séquence de Noé aurait pu aboutir à une conclusion édifiante – montrant la maladie mentale sous une forme particulièrement vibrante et, semble-t-il, créative – Philibert nous refuse les consolations évidentes en la faisant suivre de la deuxième des deux séquences avec une femme âgée profondément troublée et en colère nommée Laurence. Cela donne au film une inflexion résolument différente, révélant les extrêmes de la souffrance mentale d'une manière sombrement réaliste. Ces séquences soulèvent cependant également d’épineuses questions de consentement et d’intrusion ; des questions similaires ont été soulevées en 1967 par un autre documentaire sur les institutions psychiatriques, le controverséLes folies de Titicut, par l'âme sœur de Philibert, Frederick Wiseman.
En plus des rares réunions et activités de groupe brièvement montrées, des plans ponctuels montrent les couloirs et les cours de l'hôpital Esquirol, y compris les cloîtres d'aspect monastique qui sont des traces des débuts moins éclairés du bâtiment. Bien que cela ne soit jamais commenté, l'hôpital était autrefois connu sous le nom d'asile de Charenton, abritant à l'époque des patients aussi éminents que le poète Verlaine et le marquis de Sade.
Sociétés de production : TS Productions
International sales: Les Films du Losange[email protected]
Producers: Miléna Poylo, Gilles Sacuto, Céline Loiseau
Photographie : Nicolas Philbert
Editeurs : Nicolas Philbert, Janusz Baranek