"Onoda - 10 000 nuits dans la jungle" : Critique de Cannes

En ouverture d'Un Certain Regard, le long métrage d'Arthur Harari suit un soldat japonais qui continue de se battre à travers les décennies

Réal : Arthur Harari. France/Japon/Allemagne/Belgique/Italie, Cambodge. 2021. 165 minutes

Une entreprise ambitieuse qui tient ses promesses,Onoda - 10 000 nuits dans la jungleaborde l'incroyable histoire vraie du soldat japonais titulaire qui a passé 30 ans caché dans la jungle philippine sans savoir que la Seconde Guerre mondiale était terminée. Cette histoire captivante de patriotisme malavisé recrée un ensemble de circonstances disparues grâce à d'excellentes performances et des choix cinématographiques bien adaptés. Même s'il y a quelques accalmies méditatives dans cette aventure de 165 minutes – qui ouvre Un Certain Regard à Cannes – les débats ne sont jamais ennuyeux et une accumulation de détails mène à un dénouement mémorable et émouvant.

La foi obstinée d'Onoda dans sa hiérarchie militaire a une beauté résiduelle qui lui est propre

Le scénariste-réalisateur Arthur Harari s'est fait remarquer pour son premier film,Diamant noir,une histoire de braquage et de vengeance à plusieurs niveaux en langue française se déroulant chez des diamantaires à Anvers. Cette aventure raffinée et finalement embarrassante en japonais et en tagalog marque pour lui un pas de géant.

En septembre 1974, un jeune homme (Taiga Nakano) arrive en bateau sur une île des Philippines. Il installe son camp, accroche un drapeau japonais et diffuse une chanson plaintive en japonais à partir d'un lecteur de cassettes. Il espère attirer un homme que nous voyons pour la première fois portant un camouflage de feuillage et parlant à divers endroits avec des tons respectueux tout en déposant des fleurs. Avec de nombreux développements inattendus en cours de route, cette histoire touchante, parfois violente, racontée presque entièrement en flashback, replacera les actions de 1974 dans leur contexte.

Fin 1944, le Japon est en train de perdre la guerre et les Américains vont bientôt arriver. Hiroo Onoda (Yuya Endo au début ; Kanji Tsuda dans le rôle de l'homme plus âgé), un pilote potentiel qui s'est dégonflé après une mission kamikaze, est ivre, à la recherche de rédemption et donc une recrue attrayante pour le major Taniguchi (sans fioritures). Issei Ogata). La jeunesse d'Onoda, sa lâcheté antérieure et ses relations conflictuelles avec son père s'ajoutent à la nécessité de réussir la mission qui lui est assignée : protéger et diriger ses hommes stationnés aux Philippines afin qu'ils soient prêts à repousser l'ennemi.

En tant que rouage de la soi-disant guerre secrète, Onoda se met au service de l'empereur avec un zèle qui devient son propre dévouement hermétique et inutile. À cause du destin et des accidents, le groupe d'origine sous son commandement se réduit à lui-même et à un autre soldat, Kozuka (Yuya Matsuura, puis Testsuya Chiba).

À leur connaissance, des renforts pourraient arriver d’un jour à l’autre. Leurs vêtements deviennent un patchwork de raccommodage et leur esprit est mis à rude épreuve. Leur discipline et leur autonomie sont admirables, mais au service constant d’un manque d’information.

La séquence comique du Nouvel An 1950, dans laquelle Onoda et Kozuka suivent leur propre logique alambiquée pour conclure qu'une équipe de sauvetage est en fait là pour les attraper, est un classique du raisonnement paranoïaque. Ce n'est pas vraiment le père d'Onoda qui utilise un haut-parleur pour l'encourager à se montrer, concluent-ils – c'est sûrement ce que les imbéciles de QAnon appelleraient maintenant un « acteur de crise » se faisant passer pour son père pour les inciter à se rendre. La délégation quitte les journaux et magazines pour donner aux soldats récalcitrants une idée de la manière dont le Japon a changé au cours des cinq années écoulées depuis qu'ils disent que la nation a été vaincue. Le Japon est-il une démocratie, se demandent-ils ? Et la Chine est-elle vraiment communiste ?

Au moment où Onoda et Kozuka apprennent – ​​via une radio à transistor volée fabriquée par une nouvelle société appelée Sony – des hommes marchant sur la lune, étant restés vigilants et en état de combat tout en continuant d'attendre des renforts pour repousser l'ennemi, Cela semble être un exploit aussi étonnant que tout ce que la NASA a pu accomplir.

L'histoire est racontée de telle manière que les téléspectateurs sont dans l'état d'esprit de survie d'Onoda, ce qui est un endroit fascinant. Une excellente conception sonore donne l’impression que les téléspectateurs entendent ce que le protagoniste entend.

Le troisième acte incroyablement émouvant est plein de suspense, surtout pour les téléspectateurs qui ne savent pas si Onoda a finalement accepté ou non de se rendre. La dévotion rituelle de ce vieux soldat à la mémoire de ses camarades tombés au combat met subtilement en évidence l'idiotie et la brutalité de la guerre, mais la foi obstinée d'Onoda dans sa hiérarchie militaire a une beauté résiduelle qui lui est propre.

Sociétés de production : bathysphère], à suivre

International Sales: Le Pacte

Producer: Nicolas Anthomé

Scénario : Arthur Harari, Vincent Poymiro en collaboration avec Bernard Cendron, librement inspiré de la vie de Hiroo Onoda

Conception des décors : Brigitte Brassard

Editor: Laurent Sénéchal

Photographie : Tom Harari

Musique : Sebastiano De Gennaro, Enrico Gabrielli, Andrea Poggio, Gak Sato, Olivier Marguerit

Acteurs principaux : Yuya Endo, Kanji Tsuda, Issei Ogata, Yuya Matsuura, Testsuya Chiba, Taiga Nakano