Le film de Lukas Dhont, lauréat d'un Grand Prix, est une étude intime et discrètement dévastatrice de l'amitié d'enfance entre deux garçons.
Réalisateur : Lukas Dhont. Belgique/France/Pays-Bas. 2022. 104 minutes
La désintégration d'une amitié entre deux garçons à l'aube de l'adolescence dans la campagne belge déclenche une tragédie, dans le deuxième film tranquillement dévastateur de Lukas Dhont. Une étude sur des enfants confrontés à un deuil qu'ils n'ont ni la maturité ni le tempérament pour bien comprendre sera toujours une proposition puissante, mais la combinaison de performances époustouflantes, notamment du nouveau venu Eden Dambrine dans le rôle de Léo, et La direction d'une sensibilité hors du commun de Dhont donne lieu à une image d'une portée intime mais qui contient un coup émotionnel considérable.
Dhont utilise avec élégance les routines quotidiennes de l'école et de la routine extrascolaire d'un enfant pour montrer comment rien ni tout peut changer d'un seul coup.
Dhont s'est déjà montré un talentueux metteur en scène de jeunes acteurs avec ses débuts,Fille, projeté à Cannes Un Certain Regard en 2018, où il a remporté plusieurs prix, dont la Caméra d'Or du meilleur premier film. Son travail surFermers'appuie sur cela, capturant à la fois le monde intérieur bouillonnant du personnage central et les changements de statut de terrain de jeu, les tensions qui peuvent couver ou déclencher un commentaire jetable. Le récent succès du film de Colm BairéadLa fille tranquille, un film qui partage avecFermerune approche délicate et une étreinte empathique, suggère qu'il existe un bon appétit du public pour des films traités avec sensibilité comme celui-ci, qui explore les bords inconfortables de l'enfance. Mubi a acquis le titre pour plusieurs territoires, dont le Royaume-Uni et l'Irlande.
Nous rencontrons Léo et son meilleur ami Rémi (Gustav De Waele) à la fin de ce qui semble être un été d'enfance sans fin. Ils combattent des envahisseurs imaginaires ; ils sprintent à travers les champs de chrysanthèmes que la famille de Léo cultive dans leur ferme fleurie ; ils dorment, emmêlés sur le même lit, la respiration et les membres s'entremêlant. Mais même s'ils ne s'en rendent pas bien compte, l'été, comme cette période de l'enfance, touche à sa fin. Le motif orchestral vertigineux et tumultueux des premières scènes cède la place à des sonorités plus plaintives et incertaines – ce n'est pas un hasard si Rémi joue du hautbois, sûrement le plus triste de tous les instruments à vent.
Les deux garçons, aussi proches que frères, commencent une nouvelle école. Nerveux, ils se serrent les coudes alors qu’ils naviguent dans les nouvelles structures sociales de l’enseignement secondaire. Leur intimité physique ne passe pas inaperçue. Dhont n'exagère pas : c'est dans le bref regard d'un autre garçon qui remarque quand Rémi pose sa tête sur l'épaule de Léo, une interrogation des filles pour savoir si elles sont « ensemble ». Il suffit d'effrayer Léo, de lui faire prendre soudain conscience de la proximité qui était auparavant leur état naturel incontesté. Il commence à prendre de la distance entre eux, se lance dans des discussions passionnées sur le football avec les enfants sportifs et se met à jouer au hockey sur glace. Un travail de caméra à main habile capture la façon dont son regard est toujours attiré par son ancien meilleur ami, maintenant assis dans les marges sibériennes de la cour d'école avec les autres enfants ringards. Mais lorsque Léo annule unilatéralement leur accord de longue date pour aller ensemble à l'école à vélo, Rémi s'effondre.
Sans trop en révéler sur l'histoire, il suffit de dire que Dhont utilise avec élégance les routines quotidiennes de l'école et de la routine extrascolaire d'un enfant pour montrer comment rien ni tout peut changer d'un seul coup ; comment trouver les mots pour parler peut être la partie la plus difficile de la gestion des sentiments pour de nombreux jeunes garçons. Il y a une scène extraordinaire vers la fin du film où Léo, la tristesse le saturant comme de l'encre sur un buvard, ramasse un bâton, comme s'il pouvait tant bien que mal combattre ses émotions. Il y a une naïveté et une futilité dans ce geste, dans la mesure où il évoque les jeux de guerre joués dans des temps plus heureux : c'est un moment totalement déchirant.
Société de production : Menuet, Diaphana Films, Topkapi Films, Versus Production
Ventes internationales : The Match Factory,[email protected]
Producteurs : Michiel Dhont, Dirk Impens
Scénario : Lukas Dhont, Angelo Tijssens
Conception des décors : Eve Martin
Photographie : Frank van den Eeden
Editing: Alain Dessauvage
Musique : Valentin Hadjadj
Casting principal : Eden Dambrine, Gustav De Waele, Émilie Dequenne, Léa Drucker, Igor Van Dessel, Kevin Janssens, Marc Weiss