Noémie Merlant and Adèle Haenel inPortrait d'une dame en feu.Photo : avec l’aimable autorisation du TIFF

« Parlez du regard féminin », une femme sortant de la première projection torontoise dePortrait d'une dame en feudit son compagnon alors que la foule se dirigeait vers les escalators. "Ce film n'est rienmaisle regard féminin.

Elle avait raison. Le film de Céline Sciamma, qui a remporté le prix du meilleur scénario et la Queer Palm à Cannes en début d'année, est un film sur le plaisir d'observer et d'être observé. L'histoire se déroule dans un château isolé de Bretagne, à la fin de l'Ancien Régime, lorsque la peintre Marianne (Noémie Merlant) arrive avec une mission particulière : créer un portrait de la jeune noble Héloïse (Adèle Haenel) sans qu'elle s'en aperçoive. La raison pour laquelle cela frise la tragédie gothique. La sœur d'Héloïse est morte d'une chute du haut d'une falaise en bord de mer – la question reste de savoir si elle est tombée ou a sauté – et maintenant la jeune femme est sur le point d'être expédiée à sa place chez un prétendant à Milan. Mécontente de son sort, Héloïse refuse de poser pour un portrait qui sera envoyé à son fiancé, d'où le subterfuge. Le jour, Marianne se fera passer pour la compagne de promenade d'Héloïse ; la nuit, elle peindra le portrait de mémoire.

Alors que les femmes entament leur première sortie, Sciamma retient notre premier aperçu d'Héloïse : on la voit de dos, dans le POV de Marianne, un plan qui obscurcit son visage si longtemps que c'en est presque douloureux. Mais une fois qu’ils commencent à se regarder, ils ont du mal à s’arrêter. Il s'agit d'un film sur des femmes qui regardent des femmes, tourné par deux femmes. (La directrice de la photographie est Claire Mathon, qui fait pour la lumière du soleil ce que Roger Deakins fait pour les ombres.) Le regard de Marianne est furtif et inquisiteur : elle veut savoir comment Héloïse lui tient les mains, ce que fait sa bouche quand elle sourit, comment joue la lumière. son oreille. Le regard d'Héloïse est autre chose. Dans des films commePeau de daim, Haenel a un air résolument moderne, et ici elle semble presque hors du temps : dans ce décor d'époque luxuriant, son regard est dur et impassible, comme si elle regardait un tigre.

Tomber amoureux, c'est se sentir vraiment vu, etPortraitsuggère que l’inverse est également vrai : voir quelqu’un tel qu’il est réellement, c’est aussi tomber amoureux d’eux. Finalement, la culpabilité de Marianne prend le dessus et elle révèle le portrait à Héloïse, qui est déçue, non seulement à cause de la ruse, mais aussi parce que le tableau ne capture rien de son esprit. Elle décide de poser un deuxième portrait, et alors que les femmes peuvent enfin se regarder librement, leur amitié se transforme peu à peu en une histoire d'amour douce-amère. Le tableau sur lequel ils collaborent est l’objet même qui mettra fin à leur relation. Un parallèle est fait avec l'histoire d'Orphée et Eurydice : pour Marianne, voir Héloïse, c'est la perdre, mais dans un autre sens, c'est aussi une façon de l'avoir pour toujours.

Sur la base de leurs romances queer interdites, de leurs scènes d'amour sensuelles et de leurs lieux européens saisissants (vous aurez envie de réserver un voyage en Bretagne immédiatement après avoir quitté le théâtre), il est tentant d'appelerPortrait d'une dame en feu cette annéeAppelez-moi par votre nom. Mais pendant queCMBYNa joué le fantasme de deux personnes ne faisant plus qu'une,Portraitest plus en phase avec la fascination de la différence, comment les gestes et les manières d'un amoureux peuvent en venir à résumer tout un monde. Le regarder, c'est tomber dans votre propre transe - Sciamma remplit ses cadres d'images conçues pour inspirer une obsession privée, de la photo principale d'une Héloïse imperturbable avec sa robe enflammée, aux traînées de crachats post-makeout les plus amoureusement photographiées. que j'ai jamais vu, et culminant dans un plan final qui rivalise avecCMBYNdans sa majesté. D'autres journalistes avec qui j'ai parlé au TIFF en sont ressortis captivés, et je ne serais pas surpris si, comme une autre romance jouée à Toronto l'année dernière, c'est un film que les spectateurs ne peuvent pas empêcher.jeter un autre regard sur.

Le TIFF tombe sous le charmePortrait d'une dame sur Feu