La Quinzaine des Réalisateurs s'ouvre avec le dernier ouvrage posthume de Sophie Fillières, avec une Agnès Jaoui douce-amère
Dir/scr : Sophie Fillières. France. 2024. 99 minutes
Une femme d'une cinquantaine d'années fait face à une crise existentielleCette vie qui est à moi, un brin doux-amer d'un film qui n'acquiert un certain poids que si l'on connaît les circonstances de sa fabrication – la célèbre scénariste/réalisatrice Sophie Fillières était en phase terminale pendant sa production. Elle a réussi à achever la photographie et, après son décès en juillet 2023 à l'âge de 58 ans, le travail a été terminé par ses deux enfants, les acteurs Agathe et Adam Bonitzer. Le film fini a certainement ses qualités, mais peut-être pas assez pour captiver les spectateurs qui s'attendent à ce qu'un protagoniste fasse plus que suivre une boussole intérieure dont l'aiguille pointe dans des directions principalement aléatoires, bien que parfois touchantes.
Un adieu agréable, voire mémorable
En tant qu'écrivain, réalisateur et acteur, les crédits de Fillières remontent à plus de trois décennies ; elle a récemment collaboré avec Elise Girard sur le scénario du titre Venise 2023Sidonie au Japon, et est apparu dans la Palme d'Or et le film oscarisé de Justin TrietAnatomie d'une chute. Cet héritage devrait permettre aux spectateurs français d'être charmés et émus lors de la sortie du film dans ce pays le 18 septembre, après l'ouverture de la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes où il n'y aura probablement pas de sécheresse oculaire dans la salle. Le plaisir des cinéphiles d’ailleurs dépendra de leur penchant pour l’humour de l’usure.
Agnès Jaoui, dans son troisième grand rôle cette année après celui de Noé DebréUn gentil garçon juifet celui de Julien CarpentierC'est ma mère, est un choix parfait pour incarner la protagoniste Barberie Bichette, une créatrice joviale et enjouée qui prend congé de ses sens ou de la vie elle-même. Elle est une rédactrice publicitaire qui s'intéresse aux romans et à la poésie – ou une poète et romancière qui s'intéresse aux stratégies publicitaires d'entreprise. Difficile à dire. Ce qui est clair, c'est qu'elle n'a jamais aimé qu'on l'appelle Barbie.
Elle démissionne de son emploi dans son agence à l'allure branchée, ce qui lui laisse plus de temps pour se parler. Elle serait apparemment ravie de parler plus souvent avec son fils et sa fille, Junior (Edouard Suplice) et Rose (Angelina Woreth), mais leurs interactions sont pour la plupart gênantes. Barbie dit et fait des choses originales qui la distinguent dans presque toutes les situations, mais reste attrayante grâce au portrait convaincant de Jaoui d'une résilience plutôt optimiste.
Troublée, Barbie entre à l'hôpital – même si ce qui la souffre vraiment pourrait être mental, physique ou existentiel, ou les trois. À un moment donné, un homme commence à lui parler. Il se souvient très bien d'elle, remontant aux étés d'il y a 40 ans. Elle n'a aucun souvenir de lui.
La famille et les collègues accueillent Barbie mais avec une exaspération parfois évidente, notamment de la part de sa fille. Jaoui ne montre aucune vanité dans ce rôle, jouant une femme qui projette sa propre marque d'optimisme, même si ses enfants boudent. On la soupçonne d'être terrifiée par ce qui lui arrive mais son attitude reste zen, son humour d'autodérision toujours au rendez-vous. Et elle se retrouve dans un coin peu peuplé d’Écosse pour une douce punchline qui vaut plus ou moins la peine d’attendre.
La toute première séquence du film montre Barbie devant son ordinateur en train de choisir une police de caractères. Ce qui est vraiment amusant au début continue au point qu'on a envie de crier « Décidez-vous, déjà ! ». Pourtant, ce n’est pas parce que cette incertitude est le ton dominant du film qu’un travail de caméra à main légèrement nerveux était le meilleur choix tout au long du film.
Construit à partir de rencontres à la fois aléatoires et délibérées,Cette vie qui est à moiest un adieu agréable, voire mémorable, faisant appel au cinéma comme moyen précieux de célébrer les hauts et les bas, les émotions et l'absurdité de la vie réelle.
Société de production : Noël en juillet
Ventes internationales : The Party Film Sales[email protected]
Productrice : Julie Salvador
Photographie : Emmanuelle Collinot
Production design: David Faivre, Camille Arthuis
Editing: Francois Quiquere
Music: Philippe Katerine
Casting principal : Agnès Jaoui, Angelina Woreth, Edouard Suplice, Valeries Donzelli, Laurent Capelluto, Emmanuel Salinger, Philippe Katerine