« Notre mémoire nous appartient ? : CPH: Revue DOX

Trois journalistes syriens exilés se réunissent pour regarder des images du début de la révolution

Réalisateurs : Rami Farah, Signe Byrge Sorensen. Syrie/Danemark/France/Palestine. 2021. 90 minutes.

Notre mémoire nous appartientest une réponse inventive à la question de savoir comment transformer des images militantes urgentes et brutes, capturées à la volée, en un portrait cohérent d'une révolution. Enregistré à Daraa, en Syrie, entre 2011 et 2012, le film invite à un dialogue entre le matériau et trois des hommes qui l'ont tourné. Le résultat est une interrogation personnelle, puissante et stimulante, non seulement sur le mouvement populaire contre le régime d’Assad, mais aussi sur le rôle joué par les journalistes citoyens dans la sensibilisation à ce régime.

Un interrogatoire personnel, puissant et qui fait réfléchir

C'est une expérience doublement puissante ? les images déjà saisissantes reçoivent un poids supplémentaire par les réactions émotionnelles des hommes qui les regardent à nouveau, réunis pour la première fois depuis leurs exil au Royaume-Uni, en Allemagne et aux Pays-Bas. Ce n'est en aucun cas le premier film à explorer le rôle du journaliste citoyen dans le conflit syrien ; des exemples notables incluentPour SamaetVille des fantômes. Mais même s'il est peu probable que cela corresponde à l'impact culturel du premier et manque du lyrisme du second, l'approche réflexive de ce film et sa concentration sur Daraa lui donnent un angle nouveau qui devrait attirer l'attention des autres programmateurs de festivals et des humains. -les organisations de défense des droits.

En 2012, le cinéaste et performeur syrien Rami Farah, basé à Paris, s'est vu confier un disque dur rempli de fichiers documentant les manifestations naissantes alors qu'elles se transformaient en soulèvement. L'homme qui le lui a remis, Yadan Draji, avait été contraint de fuir la Syrie avec rien d'autre que cette collection de séquences vidéo, enregistrées par lui et quatre amis. Farah ne connaissait pas la ville, mais grâce aux bribes de vidéos capturées par les téléphones et les appareils photo, il a pu créer une représentation cartographique stylisée de Daraa telle qu'elle était. Cela a ensuite été projeté sur un écran de fond dans un théâtre parisien où, près de 10 ans après les premières manifestations, Draji a retrouvé deux de ses collègues reporters de guérilla, Odai Al Taleb et Rani Al Masalma.

La technique de Farah est simple ? il projette sur l'écran des images du disque dur de Draji et, à l'aide de trois caméras, capture les réponses des hommes et leurs souvenirs. Dès le départ, le processus est chargé d’émotion. En regardant un clip des soldats du gouvernement, raconté de manière moqueuse par un homme qui a déguisé sa voix de manière comique, Draji tente de deviner l'identité de l'orateur. Il sourit avec appréciation : « J'aimerais pouvoir faire sa connaissance. » Un instant plus tard, Al Taleb reconnaît la voix comme étant celle d'Abu Nimir, un ami proche et collaborateur des trois. « Dieu ait son âme. » Draji s'étrangle, "Il me manque." Caméraman amateur, Abu Nimir s'est retrouvé dans la position inattendue de reporter pour Al Jazeera. Habitué à se cadavrer devant la caméra et à se déguiser avec de fausses barbes, il a apporté une légèreté bien nécessaire aux premiers stades du soulèvement. Sa mort ? il a été abattu alors qu'il préparait un reportage pour la chaîne d'information ? est la seule séquence que ses amis refusent de revoir. De manière quelque peu controversée, Farah choisit quand même de l’inclure dans le film.

Aussi douloureux soit-il pour tous les trois de revivre des souvenirs qu’ils ont tenté de supprimer au cours de la dernière décennie, il s’agit d’un processus précieux. Ce que les hommes décrivent comme leur « engagement moral envers le cinéma » ? même les documents les plus poignants de la révolution ont évolué vers une obligation similaire de contextualiser, d’élucider et de témoigner. Et pleurer la mémoire d’amis tombés au combat et un pays qui leur est perdu.

Société de production : Final Cut For Real, On Screen Off Record Productions, OSOR Palestine

Ventes internationales : Final Cut For Real,[email protected]

Producteurs : Signe Byrge Sorensen, Lyana Saleh, Anne Köhncke

Photographie : Henrik Bohn Ipsen

Editing: Gladys Joujou

Musique : Kinan Azmeh