Le drame d'Anne Fontaine compte des interprétations de poids d'Omar Sy, Virginie Efira et Grégory Gadebois
Réal. Anne Fontaine. France. 2020. 134 minutes.
Les flics ont aussi des vies privées, des consciences… Ces révélations ne sont pas nouvelles dans les films de procédure policière, surtout quand le genre rencontre le drame psychologique dans le cinéma français. Tout le mérite revient à la réalisatrice polyvalente quoique inégale Anne Fontaine pour avoir tenté d'aborder ce thème d'une manière dure et émotionnellement sérieuse, maisÉquipe de nuit– malgré sa stratégie d’ouverture intelligente et multi-angles – s’avère une affaire solennelle, émotionnellement surmenée et narrativement invraisemblable.
Virginie Efira – clairement au bord d'une percée internationale avec le film de Paul VerhoevenBéni– continue d'impressionner avec une commande cool
Fontaine, auparavant connue pour ses plats plus légers et plus brillants, s'est concentrée ces dernières années sur des matériaux plus lourds (Les innocents,Réinventer Marvin) mais cette affaire solennelle et à la mâchoire serrée ne la trouve pas tout à fait à l'aise. Les solides performances des principaux protagonistes, Virginie Efira et Omar Sy, devraient renforcer la visibilité nationale du film lors de sa sortie en France en avril, tandis que l'intérêt constant pour la production française sur le thème du crime devrait offrir des perspectives d'exportation modérées.
Basé sur un roman d'Hugo Boris, le film porte le titre original françaisPOLICE, épelé à l'envers sur l'écran – à ne pas confondre non plus avec celui de Maurice PialatPoliceou celui de MaiwennPolitiques, bien qu'il partage leur thème consistant à se mettre derrière les uniformes bleus. Une construction astucieusement superposée présente les trois principaux cuivres. Central est Virginie (Virginie Efira), mariée avec un jeune enfant et avec un mari qui apparaît comme une douleur inefficace. Durement mordue et réticente à révéler ses émotions, elle est considérée dans la police comme distante – son collègue Aristide (Sy), qui joue le bouffon machiste au travail, l'appelle « Miss Norvège ». Mais lorsqu'on fait la connaissance d'Aristide dans une rubrique qui lui est consacrée, on découvre qu'il est bien plus sensible qu'il n'y paraît, et que lui et Virginie entretiennent une relation étroite et solidaire et un respect mutuel professionnel et personnel. Ils ont aussi couché ensemble, et Virginie – certaine d'être enceinte d'Aristide – s'apprête à avorter. Ensuite, il y a Erik (le pilier du personnage gaulois Grégory Gadebois), un homme d'âge moyen irascible avec une approche conforme aux règles, des frustrations conjugales latentes et une relation à la limite du volcan avec la bouteille.
Des épisodes qui se chevauchent adroitement, des scènes qui se répètent avec des effets très différents, Fontaine, la co-scénariste Claire Barré et le monteur Fabrice Rouaud ont préparé le terrain pour que les tensions bouillonnent, mais l'épisode central suivant se déroule sans plat. Une nuit, les trois s'engagent pour une tâche délicate : accompagner le demandeur d'asile tadjik Tohirov (l'acteur iranien Payman Maadi) jusqu'à l'aéroport Charles de Gaulle pour y être expulsé. Mais il est clairement confronté à un danger chez lui, et il a une chance de répit si seulement il peut rester en France un peu plus longtemps. Sur le chemin de l'aéroport, Tohirov, intrigué, est assis menotté sur la banquette arrière pendant que les flics discutent du conflit entre leur devoir de policier et leur devoir moral. Finalement, ils prennent la décision d'agir, mais c'est une décision invraisemblable qui se déroule à un rythme dramatique et grinçant, en grande partie dans l'enceinte de la voiture de police. Les atmosphères nocturnes troubles, conçues pour intensifier le drame, ont plutôt un effet oppressant.
Cependant, l'évocation des affaires courantes de la police est solidement réalisée, et le jeu des acteurs est bon, avec Gadebois – un expert en agitation irritable – donnant à Erik un poids maussade imposant. Omar Sy rend Aristide tout en nuances, un instant rustre, un instant sensible et chaleureux. Et Virginie Efira – visiblement sur le point de percer à l'international avec le film de Paul VerhoevenBéni– continue d’impressionner avec une commande cool, sans jamais trop en dire sur son personnage, mais évoquant d’intenses troubles émotionnels derrière l’extérieur calme. Malheureusement, Payman Maadi, alias Peyman Moadi – une présence si puissante dans le film d'Asghar FaradiUne séparation- se débat avec le rôle ingrat du prisonnier désorienté et paniqué, qui, contrairement aux intentions humanistes du film, est inconfortablement proche du stéréotype de Tohirov comme d'un étranger interchangeable et inconnaissable.
Production companies: F Comme Film, Ciné-@
Ventes internationales : Studiocanal,[email protected]
Producers: Jean-Louis Livi, Philippe Carcassonne
Scénario : Anne Fontaine, Claire Barré, d'après un roman de Hugo Boris
Photographie : Yves Angelo
Editor: Fabrice Rouaud
Production design: Arnaud de Moléron
Casting principal : Omar Sy, Virginie Efira, Grégory Gadebois, Payman Maadi [alias Peyman Moadi]