Un vendeur de charbon de bois congolais tente de se construire une vie meilleure dans ce documentaire primé à la Semaine de la Critique
Dir/scr. Emmanuel Gras. France. 2017 96 minutes.
Réaliser une chronique intime et lente à se construire sur les efforts d'un homme pour fabriquer, transporter et vendre du charbon de bois s'avère une tâche gratifiante pour le cinéaste français Emmanuel Gras, et largement gratifiante également pour le visionnage. Revendiquant son titre du terme swahili désignant la substance essentielle,Articleadopte une approche observationnelle des difficultés de la vie congolaise, traçant un voyage difficile mais perspicace.
Une appréciation de la nécessité de persévérance et d’endurance face à un désespoir considérable
Premier documentaire présenté en compétition à la Semaine de la Critique de Cannes, il a remporté le grand prix de la section parallèle, ce qui devrait aider le film à susciter davantage d'intérêt sur le circuit des festivals.
Agissant comme son propre directeur de la photographie sur son troisième long métrage après celui nominé aux César en 2011Bovineset 2014300 Âmes, Gras s'efforce de réaliser cet exploit factuel toujours crucial : se rapprocher physiquement et émotionnellement de son sujet, Kabwita Kasongo, 28 ans, habitant de la province du Katanga, sans projeter aucun sentiment sur son sort. Même si la partition de Gaspar Claus semble au départ un peu trop ouverte, elle est astucieusement déployée, les sons de la vie fournissant une bande-son principale appropriée.
L'appareil photo de Gras capture une sombre existence ; alors que le public peut broncher à l’idée de manger des rats, par exemple, personne à l’écran ne le fait. Tournés dans l'ordre chronologique, ces moments ne sont que quelques-uns des flux et reflux de la quête de Kabwita pour construire une nouvelle maison pour sa famille. Mari et père dévoué, il dispose d'un terrain réservé, mais doit acheter 15 tôles pour le toit de la maison de ses rêves.
En conséquence, abattre un arbre imposant a rarement semblé aussi urgent et essentiel qu'ici – tout comme marcher jour et nuit, poussant un vélo surchargé qui est clairement le bien le plus précieux de Kabwita, a rarement semblé aussi vital. Chaque réaction silencieuse à sa situation, qu’il s’agisse d’un clin d’œil ou d’une épaule affaissée, est également chargée de sens.
Lorsque Kabwita est pris au piège de son travail, le documentaire le regarde attentivement. Dans les rares moments où il prend du recul et fait le point sur sa situation, il fait également une pause. Lorsqu'il est en pleine négociation avec des acheteurs potentiels, cela bouge avec lui, les visuels ne parvenant pas à rester en place. En effet, Gras s'efforce d'apporter du lyrisme à ses images, via des ombres bien placées sur le visage de Kabwita et des déplacements rapides à travers un paysage désolé, mais le fait de concentrer si intensément le film sur une seule personne contribue à transmettre le même sentiment.
Toujours,Articledémontrer que l'histoire de Kabwita n'est pas unique. L'élargissement inattendu du cadre pour montrer qu'il n'est qu'une personne parmi plusieurs personnes effectuant le même voyage difficile le long de la route, par exemple, constitue un moment révélateur. Ainsi, lorsque des lueurs d’espoir surgissent, elles n’alimentent pas de grandes réalisations ou des résultats heureux. Au lieu de cela, le documentaire bouillonne d’une appréciation progressive de la nécessité de persévérance et d’endurance face à un désespoir considérable – et du fait que, dans ses luttes, Kabwita n’est pas seul.
Société de production : Bathysphère
International sales: Les Films du Losange, [email protected]
Producer: Nicolas Anthomé
Directeur de la photographie : Emmanuel Gras
Editeur : Karen Benainous
Musique : Gaspar Claus