« Gardiens de la formule ? : Revue de Sarajevo

Une fuite d'un réacteur de Belgrade dans les années 1950 offre des opportunités d'expérimentation médicale dans ce drame semi-fictif

Réal : Dragan Bjelogrlic. Serbie/Slovénie/Monténégro/Macédoine du Nord. 2023. 119 minutes.

La fission et la fusion des relations humaines constituent le noyau instable du réalisateur/co-scénariste serbe Dragan Bjelogrlic.Gardiens de la formule, une procédure médicale conventionnelle mais surtout engageante qui se déroule en France et en Yougoslavie en 1958. Dramatisant les traitements expérimentaux innovants d'un professeur parisien sur quatre chercheurs nucléaires irradiés par une fuite d'un réacteur de Belgrade, la coproduction Serbie-Slovénie-Monténégro-Macédoine du Nord?titre completGardiens de la formule : réaction en chaîne?a remporté le Variety Piazza Grande Award après sa première mondiale à Locarno.

Une note de bas de page historique fascinante, un traitement d'écran attendu depuis longtemps

L'actualité soudaine du thème adjacent au nucléaire - grâce àOppenheimer-et la présence d'Alexis Manenti du film de Ladj Li, nominé aux OscarsLes Miserablesdans le rôle principal?austère, tenace, brillant Professeur Georges Mathe?pourrait voir le film attirer une plus grande attention. Les perspectives pourraient être limitées en France (le film est fondamentalement un hommage au génie gaulois non-conformiste) et plus brillantes dans les territoires de l'ex-Yougoslavie après la première régionale du film à Sarajevo. Malgré les efforts acharnés de Belogrlic pour amplifier les angles cinématographiques de l'histoire, celle-ci apparaît comme un objet de prestige pour le petit écran.

Les deux derniers longs métrages de Bjelogrlic, sur le thème du footballRendez-vous à Montevideo(2014) et biopic musicalTomá(2021), ont connu un succès important en Serbie, où il compte parmi ses acteurs les plus reconnaissables. Il tient ici un second rôle dans le rôle de Leka Rankovic, la patronne croustillante de l'Institut Vinca?un centre de recherche nucléaire situé juste à l'extérieur de Belgrade, fondé en 1948 pendant les premières années de la république yougoslave et toujours opérationnel aujourd'hui. Son physicien vedette Dragoslav Popovic (Radivoje ?Rasa? Bukvic) travaille sur un programme soi-disant dédié à la recherche de nouvelles sources d'énergie pour la Yougoslavie. En fait, l’objectif parallèle, discret, est la capacité nucléaire d’un État socialiste qui, pendant des décennies, a réussi un habile exercice d’équilibre entre l’Est et l’Ouest.

Le récit se déroule sur deux pistes, alternant avec fluidité (souvent via des coupures de matchs) entre les événements qui ont conduit à la contamination à Belgrade et les traitements des semaines plus tard à Paris. L'accent est mis sur les amitiés géniales et même les passions potentiellement romantiques qui se développent entre les Yougoslaves frappés et leurs bienfaiteurs français. Cet ensemble animé (dont le toujours fiable Olivier Barthélemy dans le rôle d'un agent des services secrets) est dirigé par Manenti et Bukvic, deux hommes d'âge et de tempérament à peu près similaires, divisés par l'idéologie mais trouvant finalement un terrain d'entente respectueux.

Il s’agit évidemment d’un traitement d’écran fascinant, attendu depuis longtemps, d’une note de bas de page historique. Le scénario de Bjelogrlic, Vuk Rsumovic et Ognjen Svilicic est une adaptation du roman de Goran Milasinovic de 2017.L'affaire Vinca,mais la nature romancée du livre de Milasinovic permetGardiens de la formuleune certaine licence poétique dans le traitement des faits.

La rédactrice en chef Milena Predic, qui a travaillé sur plusieurs projets de Bjelogrlic dans le passé, fait avancer les choses à un rythme soutenu, soulignant le sentiment d'urgence?parfois beaucoup trop fort?par la partition quasi incessante et importante d'Aleksandar Randjelovic. Les tentatives de Bjelogrlic pour donner à l'image l'air d'un drame hollywoodien (ou même d'un thriller) peuvent virer autoritaire.

Son atout est d'utiliser Manenti comme centre calme et immobile du film. Mieux connu pour ses performances live-wire?il a remporté un César pour son rôle époustouflant dans le rôle du flic dominateur de Paris dans Ly?sLes Miserables(qu'il a également co-écrit)?Manenti fait ici preuve de retenue pour élaborer une caractérisation délicate. En tant que Mathe, à l'esprit moral et politiquement astucieux, un vétéran de la Résistance, anticommuniste et antinucléaire, il devient le prisme à travers lequel les courants idéologiques complexes de la guerre froide (seulement esquissés superficiellement par le scénario) apparaissent fugacement plus clairs. se concentrer. De petite taille et d'allure modeste, son Mathe dégage néanmoins une compétence impérieuse et implacable qui modifie l'atmosphère de chaque pièce dans laquelle il entre.

Société de production : Cobra FIlm

Ventes internationales : Soul Food Films, [email protected]

Producteurs : Dragan Bjelogrlic, Dragan Solak

Scénario : Dragan Bjelogrlic, Goran Milasinovic, Vuk Rsumovic (d'après le roman « L'Affaire Vinca » de Milasinovic)

Photographie : Ivan Kostic

Scénographie : Jovana Cvetkovic, Jelena Sopic

Montage : Milena Predic

Musique : Aleksandar Randjelovic

Acteurs principaux : Alexis Manenti, Radivoje ?Rasa? Bukvic, Lionel Abelanski, Ognjen Micovic, Anne Serra, Jérémie Laheurte, Olivier Barthelemy