La comédie bulgare sur l'immigration remporte le prix du meilleur film de la compétition de Tallinn
Réalisateur : Ivaylo Hristov. Bulgarie. 2020. 100 minutes
Svetla (Svetlana Yancheva) a perdu son emploi d'enseignante lorsque son école, située dans un village bulgare proche de la frontière avec la Turquie, a fermé ses portes faute d'élèves. Désormais, elle se barricade contre l'avenir avec un couteau sous son oreiller et une langue qui coupe des lanières à quiconque la croise. Un jour, alors qu'elle chasse, elle retrouve Bamba (Michael Fleming), un réfugié fuyant le conflit au Mali. Faute d'une meilleure alternative, elle l'héberge à contrecœur et, ce faisant, encourt le mécontentement de ses voisins, mais découvre une chance inattendue de bonheur dans cette douce comédie régionale d'Ivaylo Hristov.
Une comédie douce et régionale
Lauréat du prix du meilleur film à Tallinn et de la Rose d'or du meilleur film au Festival du long métrage bulgare Golden Rose de Varna,Peurdevrait trouver davantage d'intérêt sur le circuit des festivals. L'attrait considérable de la performance brusque de Yancheva sera un argument de vente, mais la comédie pourrait avoir du mal à s'adresser pleinement au public au-delà de sa région d'origine. L’image se moque de l’attitude toxique et nonchalamment zénophobe des villageois, mais pour ce faire, elle leur donne aussi la parole. Les insultes raciales abondent et les attitudes bien ancrées ne sont peut-être pas remises en question avec autant de rigueur qu’elles pourraient l’être.
Veuve depuis quinze ans, Svetla s'est installée dans une vie qui n'attend rien d'autre que des discussions au bord de la tombe avec son défunt mari et une incertitude financière. Mais même si elle repousse vivement leurs avances, elle est courtisée par au moins deux des messieurs les plus âgés de la communauté : le chef de la police des frontières Bochev (Stoyan Bochev) et Ivan, singulièrement sans charme (Ivan Savov). Mais le respect qu'elle inspire se détériore rapidement après avoir invité Bamba chez elle.
Ses raisons ne sont pas claires au départ ? elle tente de le dénoncer mais on lui dit que les cellules de détention sont pleines. Brandissant son fusil de chasse, elle lui aboie en bulgare pour qu'il s'en aille. Mais Bamba parle anglais, avec une précision qui suggère son bagage instruit. Et pour une raison quelconque, il hésite à s’aventurer dans l’inconnu. Leur relation, sans langage commun, est au début tendue. Mais peu à peu, ils se connectent, s’offrant mutuellement le soutien émotionnel et physique dont ils ont clairement tous deux besoin. Ce développement n'est pas apprécié des voisins. Le crédit de Svetla est coupé au magasin local, des pierres sont lancées à travers sa fenêtre et le mot « putain ? est griffonné sur son mur. Mais pour autant, elle embrasse un contentement qu’elle avait renoncé à revivre.
Alors que l'arc de Svetla est satisfaisant et que son personnage s'impose dans le film, Bamba est moins bien développé. On apprend qu'il est médecin, que sa femme et ses enfants ont été tués dans le conflit. Mais en grande partie, il se définit par les réactions que provoque sa présence plutôt que par ses propres actions. Il y a une qualité un peu schématique dans sa caractérisation ? et, d'ailleurs, de nombreux villageois ? ce qui se retrouve dans la décision de filmer en noir et blanc, la cinématographie grand écran capturant le paysage hivernal bulgare inhospitalier et recouvert de glace.
Mais malgré tout cela, il y a une véritable chaleur dans la relation entre Svetla et Bamba. Les scènes dans lesquelles ils parlent, à contre-courant et sur des sujets complètement différents, aboutissent en quelque sorte à une compréhension partagée et satisfaisante. Et une fin poignante parvient à transmettre simultanément l’espoir et le désespoir.
Sociétés de production : ProFilm
Contacter : ProFilm[email protected]
Producteurs : Ivaylo Hristov, Assen Vladimirov
Directeur de la photographie : Emil Christov
Montage : Tom Waszarow
Musique : Kiril Donchev
Acteurs principaux : Svetlana Yancheva, Michael Fleming, Ivan Savov, Stoyan Bochev, Krassimir Dokov