La culture lucrative du khat en Éthiopie inspire un documentaire hypnotique et immersif sur l'âme du pays.
Réal/scr : Jessica Beshir. États-Unis/Éthiopie/Qatar. 2020. 118 minutes.
L’usine de khat constitue la culture de rente la plus lucrative d’Éthiopie. L’état de bonheur qui résulte de la mastication de ses feuilles est presque un antidépresseur national. DansFaya Dayila culture, la récolte et la consommation du khat deviennent un aperçu de l'âme du pays.
La combinaison d'histoires humaines et d'images obsédantes laisse une impression durable
Le documentaire hypnotique, immersif et très beau de Jessica Beshir marque un premier long métrage impressionnant. L'engagement du public reflète peut-être un film qui incarne tous les défis et les récompenses du cinéma lent, mais un festival très médiatisé a conduit à son acquisition par Janus pour l'Amérique du Nord, MUBI s'étendant sur un certain nombre de territoires internationaux, dont le Royaume-Uni.
Faya DayiCette approche sinueuse et sans hâte vous oblige à ralentir et à vous adapter aux rythmes d'un rythme et d'une sensibilité différents. Une somnolence langoureuse enveloppe une grande partie du film. Des chiens endormis sont étendus sur les routes nocturnes, un jeune garçon flotte joyeusement à la surface d'une eau calme, des volutes de fumée s'élèvent d'un feu, le battement d'ailes d'un oiseau brise le silence, la larme d'un garçon coule silencieusement.
Beshir est scénariste, productrice, réalisatrice et directrice de la photographie, et ses images monochromes saisissantes et intensément observées sont au cœur du film. La ville fortifiée de Harar, avec son réseau de rues étroites et sinueuses, constitue une présence solide dans un tableau qui prend particulièrement en compte les liens avec la terre et la nature. L'eau est un élément récurrent, depuis les piscines peu profondes dans lesquelles les garçons jouent jusqu'à la surface fissurée du lit d'un lac asséché où l'eau coulait autrefois. La culture, la cueillette, le transport et la distribution du khat sont au cœur du film. Cela crée des emplois, une économie florissante et une distraction pour les masses. Beshir capture des images d'hommes au travail dans les champs et dans de vastes entrepôts, des feuilles rassemblées en bottes, des gerbes portées sur les épaules tandis que le produit est réparti sur le territoire.
Les relations humaines nécessitent beaucoup plus de travail de la part du spectateur. Nous avons le droit d’apercevoir des bribes de vies qui émergent dans des récits de luttes, d’amours perdus et d’anxiété face à l’avenir. Il existe un fossé générationnel évident entre les hommes plus âgés, fatalistes, et les jeunes qui se demandent s’il ne serait pas préférable de risquer de fuir le pays. "Nous ne devrions pas avoir à périr dans les déserts et les mers pour changer nos vies", a-t-il ajouté. dit l'un. Un autre garçon s'inquiète des changements de tempérament instables d'un père à la merci du khat. Pourtant, lui aussi est attiré par la feuille et l’état qu’elle induit. On lui a dit que l'effet brumeux du khat (appelé Merkhana) était comme regarder des films dans sa tête.
Faya Dayiest un film qui devient de plus en plus triste à mesure que les divers éléments commencent à se réunir. Beshir envisage une partie de la signification religieuse et spirituelle attachée au khat. Nous découvrons une terre en difficulté et comment la culture du khat est à la fois une bénédiction économique et une pierre précieuse pour l'humanité. Des expériences personnelles de torture, de violence et de répression sont racontées. Les craintes du peuple Oromo sont reconnues. Il n’est pas nécessaire d’expliquer pourquoi l’utilisation du khat est un moyen si largement accepté d’échapper à la réalité.
Une durée de fonctionnement proche de deux heures signifie queFaya Dayirisque de prolonger son accueil, mais la combinaison d'histoires humaines et d'images obsédantes laisse une impression durable.
Sociétés de production : Merkhana Films, XTR, Neon Heart Productions, Flies Collective
Ventes internationales : Cinetic Media,[email protected]
Producteur : Jessica Beshir
Montage : Jeanne Applegate, Dustin Waldman
Photographie : Jessica Beshir
Musique : William Basinski, Adrian Aniol, Kaethe Hostetter