Les figurines emblématiques de Rithy Panh imaginent un renversement de la race humaine avec peu d'espoir pour l'avenir
Réal : Rithy Panh. France/Cambodge. 2021. 98 minutes
Le dernier film de Rithy Panh est un essai documentaire à forte densité symbolique qui envisage un monde dans lequel les animaux se sont élevés et ont pris le relais de l'humanité. Après l’accélération des atrocités des XXe et XXIe siècles, nos nouveaux suzerains ? des cochons, des ours, des singes ? ont renversé les icônes de la race humaine, mais les ont trop vite remplacées par leurs propres statues et caméras de surveillance. Tirant son titre du slogan d'un T-shirt d'un adolescent tué lors des manifestations au Myanmar, le film combine les influences deFerme des animauxetLa planète des singesavec une approche vidéo flip-book de la cruauté humaine et un casting de figurines de phacochère grossièrement taillées. C'est une vision singulière et qui n'est pas dénuée d'une cruelle puissance cumulative.
C'est une vision singulière et qui n'est pas dénuée d'une cruelle puissance cumulative.
Panh revient à la compétition à Berlin après une place au festival 2020 avecIrradiés, qui a remporté le Prix du documentaire de la Berlinale. L'approche distinctive du film devrait lui permettre de se démarquer dans le paysage de la non-fiction ; d'autres projections en festival semblent probables et le film pourrait trouver une place auprès de distributeurs ou de plateformes de streaming ouvertes à l'extrémité la plus expérimentale du spectre documentaire.
Panh retrouve l'écrivain Christophe Bataille (Irradiés,L'image manquante); il apporte ici une narration lyrique et énigmatique qui donne une certaine forme aux images à l'écran. Ces images sont composées de dioramas complexes remplis de figurines, animales et humaines, et de projections sur écran partagé d'une compilation assez poignante des plus grands succès de l'humanité dans ce qu'elle a de pire. Les images de guerre, d'oppression, de vivisection animale, de destruction de l'environnement et de ce qui semble être du travail d'esclave adoptent une approche directe pour transmettre le message du film, mais les portraits photographiques des victimes des Khmers rouges au Cambodge (Panh lui-même perdu) sont tout aussi puissants. membres de la famille au régime). Les petites statuettes animalières ? des singes en tenue de combat, des cochons équipés de machettes ? rester immobiles devant des écrans diffusant des images d'archives : juger l'échec de l'humanité, ou apprendre et adopter ses méthodes ? En plus de la composante visuelle, la conception sonore ? intégrant une cacophonie de bruits d'animaux ? ajoute une couche de brutalité bestiale.
Le film de Panh est d'une grande portée thématique et il s'étend un peu trop, au détriment de la clarté de sa pensée. Parfois, la naïveté dépasse les petits chiffres grossièrement taillés : Panh n'est-il pas, semble-t-il, un fan de science, ou du moins la science entre de mauvaises mains ? dans ce cas, toutes les mains avec des pouces opposables. Une affiche d'Albert Sabin, le scientifique qui a inventé le vaccin oral contre la polio, est grossièrement barbouillée de peinture ? un commentaire sur les sentiments anti-vax ? Ou peut-être une déclaration anti-vax en soi ? Cette dernière semble peu probable, mais le fait que la position idéologique de Panh ne soit pas parfois tout à fait claire n'est pas nécessairement un problème, mais cela rend le film plutôt difficile.
Essentiellement, malgré la reconnaissance du fait que la beauté et l'harmonie sont possibles, la majorité du film soutient que les humains ne sont pas seulement capables d'atrocités, ils sont enclins à les commettre. Le réglage par défaut de l’humanité est d’opprimer les autres pour son gain personnel. Dans l’ensemble, c’est assez sombre : le film se joue comme un manifeste plaidant en faveur de l’extinction humaine.
Société de production : CDP
Ventes internationales : Playtime[email protected]
Productrice : Catherine Dussart
Screenplay: Rithy Panh, Agnès Sénémaud, Christophe Bataille
Photographie : Rithy Panh, Prum Mesa
Montage : Rithy Panh
Musique : Marc Marder
Conception et réalisation : Sarit Mang
Direction artistique : Toh