« Les oiseaux ivres » : revue de Toronto

Un travailleur migrant mexicain recherche son amant dans le drame canadien luxuriant d'Ivan Grbovic

Réal: Ivan Grbovic Canada. 2021. 104 minutes

La réalité est un sévère reproche à ceux qui poursuivent un rêve d'amourOiseaux ivres(Les Oiseaux Ivres). Avec ses visuels luxuriants et son mélange mélancolique de nostalgie, d'espoir et de détermination héroïque, le premier long métrage du réalisateur Ivan Grbovic depuisRoméo Onze(Roméo Notre) en 2011 s'adresse aux romantiques incurables. Pourtant, l’histoire d’amour de Grbovic s’accompagne également d’un contrepoint attrayant de commentaire social et devrait être adoptée dans les festivals et au-delà.

Un film qui a le cœur sur la manche

En collaboration avec la co-scénariste et directrice de la photographie Sara Mishara, Grbovic commence par une citation de John Steinbeck : « Il fait tellement plus sombre quand une lumière s'éteint qu'elle ne l'aurait été si elle n'avait jamais brillé ». Il y a quelque chose de « Cannery Row » ou « Les raisins de la colère » de Steinbeck dans la représentation du film d'une « famille » de fortune d'ouvriers mexicains employés pour couper de la laitue dans une ferme canadienne. La camaraderie, les petits actes de gentillesse et le sentiment de vivre une vie différente loin de chez soi témoignent du romantisme et de la vulnérabilité de l’expérience migrante.

Le sentiment de Steinbeck se ressent tout au long de cette histoire d'amour impossible, de sacrifice et de quête du bonheur. Willy (Jorge Antonio Guerrero) est le nouveau venu parmi les travailleurs saisonniers qui arrivent dans une ferme du Québec rural. Le propriétaire Richard (Claude Legault) semble juste et décent, et le travail n'est qu'un moyen pour arriver à une fin. Willy est à la recherche de l'amour de sa vie, Marlena (Yoshira Escarrega), et croit qu'elle s'est enfuie à Montréal. sa recherche de Marlena s'apparente à la noble quête d'un chevalier. Le film est structuré de manière à se replier sur lui-même à plusieurs reprises pour révéler davantage le passé de Willy, son sacrifice et son amour pour Marlena, l'épouse d'un puissant patron d'un cartel de la drogue.

Willy est désormais entré dans la vie d'une famille déchirée par le malheur. L'amour de Richard pour sa femme Julia (Hélène Florent) s'ébranle alors qu'il lutte pour lui pardonner son infidélité l'été précédent. La fille Lea (Marine Johnson) est mécontente de ce que sa mère a fait à la famille. La beauté de Willy, ses longs cils et son sourire éblouissant rappellent à Julia solitaire son ancien amant.

Oiseaux ivresest un film qui a le cœur sur la main. Mishara tire le meilleur parti de la lumière magique de l’heure pour peindre un Canada rural défini par des champs verts éclatants et un ciel bleu chaud. Il y a une atmosphère noirâtre dans les premières scènes des amants fugitifs, et Grbovic utilise des notes mélodramatiques de la même manière qu'un peintre pourrait introduire une couleur audacieuse sur une toile. Il y a des clins d’œil aux telenovelas et quelques chansons plaintives de feu Armando Manzanero font monter la température émotionnelle.

Le mélodrame ne devient jamais surmené, équilibré par l'authenticité du doux lien qui se développe entre Willy et Julia et par la représentation des migrants. Les longues heures de travail et le travail acharné apportent des récompenses, mais les hommes se rappellent constamment qui possède la terre, qui paie leurs salaires et qui a le pouvoir. Et comme il s'agit de l'histoire de Willy, nous en apprenons beaucoup moins sur les sentiments de Marlena ou sur sa fuite du Mexique. Le film menace de perdre son focus alors que nous sommes confrontés aux conséquences des actes imprudents de Lea mais, tout comme Willy, il trouve le chemin du retour.

Sociétés de production : micro_scope, Pimienta Films

Ventes internationales : Wazabi[email protected]

Producteurs : Kim McCraw, Luc Déry

Scénario : Sara Mishara, Ivan Grbovic

Photographie : Sara Mishara

Montage : Arthur Tanowski

Conception artistique : André-Line Beauparlant

Music: Philippe Brault

Main Cast: Jorge Antonio Guerrero, Helene Florent, Claude Legault, Marine Johnson