« Tout est calme sur le front occidental » : Toronto Review

Edward Berger explore les horreurs persistantes de la guerre dans son adaptation du roman classique de la Première Guerre mondiale

Réal. Edouard Berger. Allemagne. 2022. 143 minutes

Les conflits semblent ne jamais se terminer, et le rôle des films de guerre a toujours été de traiter – à plusieurs reprises – le désir humain d'anéantir « l'ennemi ». (Les films de guerre ont été parmi les premiers jamais réalisés, comprenant de courts extraits documentaires de la guerre hispano-américaine de 1898.) Le vétéran allemand Erich Maria Remarque, choqué par la soi-disant « guerre pour mettre fin à toutes les guerres », a écrit « Tout se calme sur le Western Front' en 1928, et le film a été filmé et a remporté trois Oscars deux ans plus tard. Aujourd'hui, Edward Berger revient aux sources allemandes, en y ajoutant quelques rebondissements, dans une adaptation déchirante et viscérale d'une œuvre vieille de près d'un siècle, écrite à l'époque où les vétérans ruinés pouvaient encore entendre le bruit des coups de feu dans leurs rêves.

Berger fait passer le message de tous les films de guerre de la manière la plus simple et la plus directe

Soutenue et distribuée par Netflix, il s’agit de l’épopée de guerre originale. Il n'y a pas de rebondissement ; ce n'est pas présenté comme un film de poursuite unique comme celui de Sam Mendes1917, un romantismeJoyeux Noelou l'histoire cruelle de la vie d'unCheval de guerre. Les adolescents partent à la guerre ; ils meurent horriblement et sont trahis à plusieurs reprises par leurs classes dirigeantes. L'entrée de l'Allemagne dans la catégorie internationale des Oscars est une montre difficile et accomplie. Chez nous, il sera examiné avec intérêt comme un retour attendu depuis longtemps à son héritage. Son sacrifice des éléments familiaux du roman en faveur d'une approche transversale du front aux négociations de paix fonctionne bien pour donner une certaine tension à un long film. Un test d'endurance difficile sur les écrans d'accueil, où il sera diffusé sur le streamer à partir du 28 octobre, c'est une expérience théâtrale enrichissante, bien que profondément bouleversante et parfois bouleversante.

Edward Berger (série téléviséePatrick Melrose, le titre peu regardé de la BerlinaleTout mon amour) fait monter considérablement la barre pour ce spectacle grand écran de mort et de destruction. Son objectif primordial est d'illustrer la répétitivité sanglante de la guerre – la nature va-et-vient de cette lutte futile qui dure depuis des années pour quelques mètres de terre. Avant le crédit, un tir de grue s'abaisse sur des images de morts alors qu'un jeune soldat appelé Heinrich passe par-dessus et est immédiatement tué. Ses vêtements sont arrachés de son corps dans une masse sanglante de cadavres, mis en sac, lavés, modifiés et renvoyés à la prochaine recrue qui remplira – littéralement – ​​ses bottes. Une contrebasse est une touche anachronique mais accroît la peur de ce qui va arriver au spectateur. Un nouveau voyage a commencé.

Le garçon en uniforme refait est le personnage central du film Paul Baumer (le débutant aux yeux écarquillés Felix Kammerer), né en 1899 et sur le front dès la troisième année de la guerre. Lui et ses camarades de classe sont remplis de ferveur – prêts à marcher sur Paris ! – mais ils n’avanceront jamais de plus de quelques mètres avant de replonger dans leurs tranchées infestées de rats. Un par un, ils meurent, tandis que Paul, affamé, parvient à survivre pendant 14 mois et noue des liens avec le soldat plus âgé Katczinsky, ou Kat (Albrecht Schuch).

Kat est plus expérimenté que Paul et vient d'une classe sociale différente – il ne sait pas lire – mais ils forment un lien désespéré ; rêver de chez eux, même s'ils savent désormais que la victoire est impossible. De brefs moments dans une ferme de Champagne sont immédiatement corrigés lorsque Paul et Kat trouvent un convoi entier de nouvelles recrues gazés à mort. L’Allemagne sera bientôt vide, soupirent-ils.

Berger n'épargne rien au spectateur alors que les yeux bleus innocents de Paul se transforment progressivement en un regard endurci au combat. Les hommes meurent brutalement avant d’avoir eu la chance de vivre, parfois de leurs propres mains. Il passe une nuit dans une tranchée crasseuse, regardant un homme qu'il a poignardé à plusieurs reprises gargouiller et mourir.

Ce qui arrêteTout est calmeDe devenir trop triste, trop cruel, à regarder, telle est la transversale du personnage de Daniel Bruhl, le politicien libéral Erzberger, alors qu'il tente de réclamer la paix contre la volonté d'une armée vaniteuse, incarnée par le général Friedrich (Devid Striesow) qui insiste sur le fait que sur l'envoi répété de ses troupes vers une mort certaine. La défaite, lorsqu'elle surviendra, se fera aux conditions françaises et, comme Erzbeger a 72 heures pour signer, Friedrich renvoie Paul dans une sortie infructueuse.

Le film aborde avec légèreté les termes de l'Armistice et les tensions qu'il va créer dans le futur, alors qu'on espère contre tout espoir une vie pour Paul à laquelle il semble avoir renoncé. Berger tient à montrer les différences de classe entre l’élite dirigeante et les enfants qu’elle envoyait mourir, quelque chose qui était interchangeable entre les camps et, d’ailleurs, entre les guerres.

Tourné en République tchèque,Tout est calmeest d'un réalisme exténuant : des séquences de combat mises en scène de manière impressionnante se succèdent avec les sons du conflit résonnant dans un bombardement cinématographique. Avec la lutte brutale en cours en Ukraine pour le territoire, Berger fait ressortir le message de tous les films de guerre de la manière la plus directe et la plus directe : le coût en vies humaines, certes, mais aussi celui de notre humanité collective.

Société de production : Film de parc d'attractions

Distribution mondiale : Netflix

Producteurs : Malte Grunert, Daniel Dreifuss, Edward Berger

Scénario : Edward Berger, Lesley Paterson, Ian Stokell, d'après le roman d'Erich Maria Remarque

Photographie : James Friend

Conception et réalisation : Christian M. Goldbeck

Montage : Sven Budelmann

Musique : Volker Bertelmann

Acteurs principaux : Felix Kammerer, Albrecht Schuch, Aaron Hilmer, Moritz Klaus, Thibault de Montalembert, Daniel Brühl, Devid Striesow