Les enfants des autresde la réalisatrice française Rebecca Zlotowski ouvre aujourd'hui (4 novembre) la 19e édition du Festival du film européen de Séville (SEFF) en Espagne, alors que le festival se prépare à présenter un melting pot decinéma européen indépendant au public espagnol.
SEFF comprend neuf sections compétitives et trois volets non compétitifs. La sélection officielle accueillera le lancement en Espagne de films dont celui de Frederick WisemanUn couple, Alexandre Sokourov?Conte de fées, Pietro Marcello?Écarlate,et Joanna Hogg?L'ÉternelFille. Parmi les prix proposés, citons le Giraldillo d'Or, pour lequel le distributeur espagnol du film gagnant recevra 35 000 euros pour la sortie en Espagne.
Une deuxième vitrine clé est The New Waves, qui présente de nouveaux films européens innovants, à la fois de fiction et de non-fiction. Le line-up comprend Pierre Földes ? animationSaule aveugle, femme endormie, María Antonia CabotJe suis vertical mais j'aimerais être horizontal,et Sergei Loznitsa?Le procès de Kiev.
SEFF, réputé pour l'importance qu'il accorde à la valeur culturelle du cinéma, présente les versions restaurées du film de Douglas Sirk.La Havane(1937) etLumière(1976). Ce dernier est le premier film obscur de la célèbre actrice Jeanne Moreau.
Du côté de l'industrie, le deuxième Marché du Film Indépendant MERCI de Séville, organisé avec l'association espagnole de distributeurs indépendants Adicine, rassemblera les principaux distributeurs indépendants d'Espagne pour des projections, des rencontres et des tables rondes avec des exploitants espagnols. Les distributeurs participants comprennent A Contracorriente, Avalon Distribución, Bteam Pictures, Caramel Films, DeAPlaneta, Elástica Films, Filmax, Golem Distribución, Tripictures, Vértigo Films et Wanda Visión.
Le directeur artistique du festival, José Luis Cinefuegos, s'entretient avecÉcransur la façon dont il pense que Séville peut contribuer aux efforts visant à maintenir le cinéma d'art et d'essai européen vivant et prospère.
Comment décririez-vous le rôle de Séville dans le calendrier cinématographique espagnol ?
En ce moment, nous, les festivals, avons l'idée de faire partie d'une chaîne de travail pour permettre aux films, notamment indépendants, d'avoir de la visibilité et, dans notre cas, aux films européens. En effet, la situation dans les salles est très différente de ce qu’elle était il y a environ cinq ans. Nous sommes désormais un pilier fondamental. Cela dit, nous avons toujours essayé de combler les lacunes que d'autres n'ont pas comblées, du moins en Espagne, et toujours avec une vision internationale, en nous concentrant sur la distribution, l'exposition et le public.
Nous avons le sentiment de faire partie de l’équipe qu’est l’industrie cinématographique européenne. Nous soutenons également directement la circulation et la visibilité des films, ce qui est non négligeable puisque le total des prix s'élève à 160 000 euros.
Que voudriez-vous souligner dans l’édition de cette année ?
Tout ce qui concerne la récupération du patrimoine cinématographique européen dans la section « Vers une autre histoire du cinéma européen », en collaboration avec des cinémathèques et des archives de toute l'Europe. Il s'agit notamment de la Cinémathèque espagnole elle-même, de l'Institut national du cinéma de Hongrie, des Archives cinématographiques grecques, de la Fondation Friedrich Wilhelm Murnau et de l'Eye Filmmuseum d'Amsterdam.
Cela a été une agréable surprise de voir à quel point il attire l'attention, ce qui me fait penser que la nécessité de revaloriser la mémoire et l'histoire du cinéma européen a été injustement négligée. En ce sens, je crois que nous naviguons tous ensemble. L'Académie européenne du cinéma, par exemple, a créé cette année un nouveau département du patrimoine dirigé par Pascal Edelmann. Il ne faut pas s’abandonner uniquement aux œuvres contemporaines les plus en vogue.
Ce thème se poursuit-il dans le volet des discussions publiques, « Voix essentielles ? »
Oui, le festival proposera des conversations publiques avec des cinéastes qui représentent des références incontournables du cinéma européen contemporain comme Alexandr Sokurov, Michel Ocelot, Signe Baumane, Juan Antonio Bayona ou Alex de la Iglesia. Toujours guidé par l’idée de valoriser le patrimoine cinématographique européen.
Quels sont les moments forts personnels de la programmation de cette année ?
Je suis très heureuse d'inclure deux réalisatrices qui ont remporté de nouveaux prix de mise en scène [lors de festivals cette année] : l'Irakien Kurdwin Ayub avecFilsà Berlin, et la Française Alice Diop avecSaint Omerà Venise.
Je voudrais également mentionner le docu-fictionGigi la loid'Alessandro Comodin dans la vitrine Nouvelles Vagues et celle d'Helena WittmannFleurs Humaines De Chair.
Certaines productions espagnoles seront également présentées en première mondiale à Séville. Le premier long métrage de Néstor Ruiz Medina21 Paradisest projeté ici et se dirige ensuite vers les Nuits noires de Tallinn en Estonie. Aussi, Nacho A. Villar et Luis Rojo?La mauvaise famille, le film d'ouverture de New Waves, projeté à Rotterdam dans la barre latérale Bright Future.
Parlez-nous un peu plus du Marché du Film Indépendant MERCI cette année.
C'est l'autre axe de Séville. C'est très gratifiant d'accueillir plus de 100 exploitants espagnols à Séville pour regarder des films et interagir avec les distributeurs. Nous organisons le MERCI aux côtés de l'ADICINE, sur le modèle de la manifestation commerciale Filmkunstmesse de Leipzig.
Cela fonctionne bien car cela va au-delà des projections privées. Nous organisons également des panels et des discussions avec des professionnels de ComScore et des cinémas d'art et d'essai européens, que nous organisons en collaboration avec la CICAE, la confédération internationale des cinémas d'art et d'essai. Nous explorerons de nouvelles stratégies pour fidéliser le public. L’une des préoccupations auxquelles nous nous attaquerons cette année est le déclin de la couverture cinématographique dans les grands médias. Je crois que ces formes de médias devraient être conscientes du fait que nous en avons besoin pour que le cinéma puisse maintenir sa visibilité sociale.
Envisagez-vous d’étendre les activités de l’industrie ?
Nous commencerons par le Seville Cinema Lab en 2023. D'un côté, nous essaierons de stimuler la coproduction avec un pays spécifique et nous travaillons déjà avec le CNC français pour cela. Une deuxième partie sera consacrée à l'analyse des nouvelles stratégies marketing possibles pour la distribution. Celui-ci sera co-organisé avec l'organisme national espagnol du cinéma, l'ICAA, et soutenu par les fonds Next Generation [dans le cadre du plan espagnol de relance, de transformation et de résilience post-COVID]
On a dit que le théâtre et les plateformes devaient apprendre à coexister. Mais le secteur de l’exploitation est désormais dans le besoin et ce besoin devrait être satisfait avec l’aide des grandes institutions cinématographiques européennes. Êtes-vous d'accord?
Oui. J’ajouterais qu’une simple aide monétaire serait inutile. L'exposition a besoin d'aide, mais pas d'une aide artificielle destinée simplement à maintenir les théâtres ouverts, mais de la découverte de nouveaux modèles pour toucher le public. Peut-être que certaines méthodes que nous appliquons encore appartiennent au siècle dernier. Ce sont ces aspects que MERCI va aborder.