Lundi soir, dans le hall de l'hôtel Majestic de Cannes, ce journaliste a repéré un homme âgé et, en tentant de lui parler, s'est mis à pleurer. Ce monsieur était Jean-Louis Trintignant, la star deL'auteur autrichien Michael HanekeAmour,et son portrait digne et dévastateur d'un mari prenant soin de sa femme (Emmanuelle Riva) alors qu'elle succombe aux ravages de la vieillesse et de la démence est devenu l'un des moments forts du festival. Demandez à n'importe qui à Cannes quel film il a le plus aimé jusqu'à présent, et neuf fois sur dix, vous entendrez «Amour», dit souvent avec un œil embué et la main sur le cœur.

Comme beaucoup de films de Haneke,Amourn'est pas un film facile à regarder. L'acte de mourir se déroule avec une lenteur atroce et sans sentiment alors que Trintignant est impuissant à faire autre chose qu'aimer sa femme et prendre soin d'elle, tandis que leur fille (interprétée par Isabelle Huppert) a du mal à comprendre pourquoi son père ne veut pas mettre sa mère dans un hôpital. Si les larmes viennent en le regardant, comme elles l'ont fait par intermittence pour ce journaliste, elles viennent convulsivement, jaillissant d'une profonde douleur personnelle, plutôt que du fait de regarder quelque chose qui sollicite activement vos pleurs. Pour moi, cela m'a rappelé la mort de tous mes grands-parents et la mort future redoutée de mes parents, ainsi que mon propre déclin éventuel avec l'âge et la question de savoir si j'aurai quelqu'un qui m'aimera autant que Trintignant dans le futur. fin.

Certains à qui nous avons parlé l'ont trouvé trop lentet j'aurais juste souhaité que ce soit déjà fini. D'autres personnes à qui nous avons parlé ont simplement dit : « Je ne peux pas » ; leurs propres expériences avec leurs proches mourants étaient tout simplement trop fraîches. Pourtant, le public est amené à parler du film d'une manière unique : pour de parfaits inconnus, discuter de la mort et de la mortalité alors qu'ils assistent à un festival de films français semble extrêmement à propos.

Lorsque j'ai croisé Trintignant au Majestic, je venais de raccrocher au téléphone avec ma mère qui m'aidait à traverser une situation délicate après le vol de mon portefeuille à Cannes. L’acteur ne parlait pas anglais – et moi, pas assez français – pour que notre conversation puisse exprimer adéquatement le beau travail que je pensais qu’il avait fait. Et pourtant, quelque part au milieu de notre échange interrompu, les nouveaux souvenirs du film se mêlaient à la gratitude que j'éprouvais envers ma mère (et à la tristesse inimaginable que je ressentirai quand elle ne sera plus là), et je n'ai pas pu m'empêcher pleurer. Et tout ça, quelques jours après avoir vuAmour. C'est simplement dire qu'à ce stade du Festival de Cannes, malgré les excellentes performances deRouille et osou les charmes rusés deMoteurs sacrés, difficile d'imaginer un autre film qui pourrait remporter la Palme d'Or.

Amour, le film triste qui vous colle à la peau