L'affaire de la vie et de la mort dans la ville de Djibouti constitue la base de ce titre de la Semaine de la Critique
Réal/scr : Khadar Ayderus Ahmed. Finlande/Allemagne/France. 2021. 83 minutes.
Une urgence sanitaire confronte un couple aimant avec un fils adolescent au cauchemar de leur propre pauvreté.La femme du fossoyeur.Ce conte contemporain se déroulant dans la ville de Djibouti utilise des éléments de base mais il y a un véritable suspense et un flair cinématographique indéniable alors que l'état de la femme titulaire se détériore et que rassembler l'argent nécessaire pour une opération chirurgicale qui sauve des vies semble impossiblement hors de portée. Le thème du film, la survie aux niveaux micro et macro, est entièrement centré sur les habitudes et les ressources africaines, tout en étant universellement accessible.
Guled doit espérer que d'autres meurent pour gagner de l'argent et empêcher la mort de sa femme
Développé à Cannes ? En résidence à la Cinéfondation, cette coproduction Finlande/Allemagne/France du scénariste-réalisateur finno-somalien Khadar Ayderus Ahmed est un bel exemple de la manière dont les entités de production européennes peuvent contribuer à faire passer des histoires africaines intéressantes à l'écran et vers une plus large diffusion. Même si seuls les quartiers les plus pauvres de la ville sont représentés, le résultat est beau, engageant et dénué de condescendance envers ses protagonistes et leur dilemme urgent.
Guled (Omar Abdi), 45 ans et travailleur, adore sa femme Nasra (Yasmin Warsame), une beauté souple souffrant d'un rein infecté. Certains diront peut-être que Warsame, mannequin canadien né à Mogadiscio, est bien trop attirant pour des circonstances aussi désastreuses, mais là encore, la beauté physique ne sait pas dans quelle tranche socio-économique elle est née. Les économies du couple grâce au travail de fossoyeur de Guled ont déjà servi à payer des antibiotiques, mais l'état de Nasra ne s'améliore pas.
Il y a une ironie au cœur de l'histoire : Guled doit espérer que d'autres meurent pour gagner de l'argent et empêcher la mort de sa femme.
Guled et ses collègues armés de pelles flânent près de l'hôpital local et sont découragés lorsqu'un jour passe sans que personne ne meure. Il s'agit d'une profession de faible statut dans laquelle vous ne pouvez pas générer d'affaires, mais où vous devez aligner vos compétences sur des circonstances indépendantes de votre volonté. Le fils du couple, Mahad (Kadar Abdoul-Aziz Ibrahim), ose avec insistance pour récolter des fonds. Il lave les pare-brise, rassemble les passagers dans les bus. Guled aspire à être un bon exemple pour son fils, mais il est contraint de lutter contre la perspective de ne pas réussir à protéger sa famille. Guled fait allusion au « retour au village » ? sans que l’on sache ce que cela signifie exactement.
Lorsque Guled décide à contrecœur de retourner, en solo, à ses racines peut-être effilochées, le voyage est pénible. Il n'y a pas d'ombre et le soleil brûlant ne se soucie absolument pas de savoir si Nasra vit ou meurt. La caméra d'Arttu Peltomaa révèle la définition même du « terrain impitoyable ». Il reste à voir si le pardon humain sera insuffisant ou important si Guled arrive à destination.
Dans une séquence divertissante où son état évolue, Nasra lance une farce audacieuse pour gâcher un mariage, impliquant une chèvre et quel que soit le mot somalien pour « chutzpah ». Ce n'est pas seulement un intermède amusant, il donne un aperçu de la complicité du couple, qui n'a fait que s'approfondir depuis qu'ils se sont enfuis du village rural où son avenir avait été arrangé sans sa contribution.
Khadar Ayderus Ahmed est né en Somalie et a vécu en Éthiopie avant que sa famille n'émigre d'Afrique vers la Finlande à l'âge de 16 ans. Son scénario s'inspire de la mort d'un membre de la famille et de la découverte de la procédure administrative formelle pour un enterrement en Finlande par rapport à la Somalie ou à l'Éthiopie. où les corps sont généralement enterrés dans les 24 heures. Le film a été tourné en 21 jours avec un casting d'acteurs débutants. Une séquence de douche littéralement torride a été gardée secrète car, hors contexte, elle serait contraire aux normes islamiques.
La partition d'André Matthias est un élément attrayant.
Sociétés de production : Bufo, Twenty Twenty Vision, Pyramide Productions
International Sales: Orange Studio, Inès Papo,[email protected]
Producteurs : Misha Jaari, Mark Lwoff, Risto Nikkilä, Thanassis Karathanos, Martin Hampel, Stéphane Parthenay, Robin Boespflug-Vonie
Conception et réalisation : Antti Nikkinen
Montage : Sébastien Thümler
Photographie : Arttu Peltomaa
Musique : André Matthias
Acteurs principaux : Yasmin Warsame, Omar Abdi, Kadar Abdoul-Aziz Ibrahim