Un film égyptien du Label Cannes fait sa révérence au Panorama, où il vaut la peine d'attendre
Réal : Ayten Amin. Egypte, Tunisie, Allemagne. 2020. 96 minutes
L’Égypte n’est pas un pays pour les jeunes femmes vulnérablesSouad. Ce drame réaliste et social d'Ayten Amin nous plonge dans la vie de deux sœurs adolescentes alors qu'elles naviguent dans une société aux attentes élevées et aux contraintes étouffantes. Sélectionné dans le cadre de la Sélection Officielle de Cannes 2020 et désormais projeté au Panorama de Berlin, il devrait largement voyager sur le circuit des festivals, attirant au passage l'attention des services de streaming et des distributeurs.
Souadc'est comme une fenêtre sur un monde que nous ne pourrions jamais voir autrement
Souadse déroule à Zagazig, une petite ville sur le delta du Nil. Souad (Bassant Ahmed) présente le monde avec de multiples personnalités. Nous la voyons d'abord dans les transports en commun, confiante et bavarde avec des inconnus alors qu'elle nourrit des fantasmes romantiques sur son fiancé Ahmed (Hussein Ghanem) et leur brillant avenir ensemble. Elle prétend qu'il est officier de l'armée dans le Sinaï et qu'elle est étudiante en médecine issue d'une famille de médecins. À la maison, elle joue le rôle d'une fille dévouée, portant le voile, faisant le ménage, cuisinant et acceptant docilement une vie de corvée domestique alors que son père aboie des demandes de thé et de biscuits. Sur les réseaux sociaux et en compagnie d’amis, elle est une personne beaucoup plus audacieuse. Elle publie constamment des photos qui horrifieraient ses parents et est laxiste dans sa pratique religieuse. « Veux-tu prier avec moi Souad ? », demande un ami. «J'ai mes règles», répond-elle insolemment en guise de refus.
Souadse sent comme une fenêtre sur un monde que nous ne pourrions jamais voir autrement. C’est un monde où il n’y a pas de place pour respirer, pas d’espace pour s’approprier. Le travail de caméra à main levée de Maged Nader et l'utilisation intensive de gros plans renforcent le sentiment d'examen et d'enfermement. Nous suivons Souad dans la maison familiale exiguë jusqu'au harcèlement. Il n’y a aucun endroit où se tourner, nulle part qui ne soit observé. Même lors d'une sortie au marché, sa mère s'accroche à son bras et la tient près de elle. Seuls l'isolement de la chambre de Souad, le balcon sur le toit de son immeuble et les réseaux sociaux sont des espaces qu'elle peut revendiquer comme siens.
Souadcapture également le lien affectueux entre Souad et sa jeune sœur Rabab (Basmala Elghaiesh). Il y a de la tendresse dans leurs querelles et une moquerie partagée à l'égard d'une tante indignée par la moindre touche de couleur dans leur garde-robe et trop prête à énumérer tout ce qui leur est interdit.
Souadse déroule en trois segments nommés en l'honneur de Souad, Nabab et Ahmed. Un incident tragique marque le milieu de l'histoire. Un sentiment de dissimulation et de blanchiment amène Nabab à en savoir plus sur la vie de sa sœur et la nature de sa relation avec Ahmed, un créateur de contenu pour les réseaux sociaux plutôt que le courageux soldat qu'elle avait autrefois revendiqué. Leur rencontre déplace le film en plein air à travers une ville regroupée autour de gratte-ciel jusqu'à une plage et une promenade le long du rivage alors que la marée coule doucement autour d'eux.
À la fin,saoudientransmet avec force le dilemme d'une jeune génération essayant de répondre aux attentes de ses parents et de la société tout en poursuivant une vie secrète de tromperies occasionnelles et de petits mensonges blancs. C'est une histoire rendue d'autant plus authentique et obsédante par l'esthétique documentaire d'Ayten Amin et les performances complètement captivantes de son casting en grande partie non professionnel.
Sociétés de production : Vivid Reels, No Images, Film-Clinic
Ventes internationales : Best Friend Forever[email protected]
Producteur : Sameh Awad
Scénario : Mahmoud Ezzat, Ayten Amin
Montage : Khaled Moeit
Photographie : Maged Nader
Prod des: Chahira Mouchire
Main cast: Bassant Ahmed, Basmala Elghaiesh, Hussein Ghanem