Une jeune fille tente de venger la mort de son père dans ce drame chilien basé sur des faits réels
Réal : Christopher Murray. Chili/Mexique/Allemagne. 2022. 101 minutes
Une fable sombre et délirante sur une adolescente cherchant une justice alternative pour la mort de son père, celle de Christopher Murray.Sorcellerie, une suite à son film de Venise de 2016Le Christ aveugle, regorge de tellement de significations qu’il semble ne pas savoir laquelle choisir. Basé sur des événements surprenants et remarquables qui se sont déroulés sur une île chilienne isolée dans les années 1880, ce film est en partie une reconstitution de légende et d'histoire, en partie une allégorie politico-religieuse, en partie une histoire de vengeance et en partie une horreur surnaturelle pure et simple. Il y a tellement de fils que c'est un miracle que Murray puisse en tirer quelque chose de cohérent ; en utilisant les atmosphères comme point d'ancrage, l'effet est submersif et convaincant.
Regorge de tellement de significations qu’il semble ne pas savoir laquelle choisir
Les films historiques chiliens se concentrent si souvent sur les années 1970 et 1980 qu'il est rafraîchissant de voir un réalisateur remonter cent ans en arrière pour aborder des thèmes liés à la suppression du patrimoine indigène qui sont encore très présents aujourd'hui, tant au Chili qu'ailleurs. Cette focalisation, combinée à la récupération d’une note historique intrigante, suggère que, malgré ses excès peut-être inévitables,Sorcelleriepourrait être bien placé pour se transformer en barres latérales de festival politiquement alertes ; la présence de Pablo Larrain comme producteur pourrait aussi aider.
Les événements se déroulent sur l'île isolée, rocheuse et toujours pluvieuse de Chiloé, au sud du Chili, un lieu aux airs de fin du monde. Rosa (Valentina Veliz Caileo), 13 ans, est servante chez Stefan (Sebastian Hulk), qui retrouve un matin tout son troupeau de moutons gisant mort dans un champ. Rapidement blâmé « les Indiens » pour le crime, Stefan lâche ses chiens sur le père de Rosa (Francisco Nunez), dont la disparition effroyable est, heureusement, enregistrée dans un long plan flou. En quête de justice, Rosa se rend chez le maire local Acevedo (Daniel Munoz), amer par son affectation dans cet enfer, puis chez un prêtre local : tous deux s'en lavent les mains. Alors si la loi et l’Église ne veulent pas savoir, vers qui une pauvre fille se tournera-t-elle ?
Rosa se présente à la porte de Mateo Parancan (Daniel Antivilo), magnifiquement grisonnant : on ne sait pas clairement qui est Mateo, mais nous apprenons plus tard qu'il est le chef d'une secte clandestine anticoloniale (ou d'un groupe de résistance, selon votre point de vue). de vue) de l'indigène Huilliche appelé la Recta Provincia, qui utilise la sorcellerie pour atteindre ses objectifs politiques – par exemple en se transformant en animaux qui tuent ensuite les moutons des Allemands qui ont occupé leurs terres. Et lorsque les enfants de Stefan finissent par disparaître, c'est l'enfer qui se déchaîne.
Sous l’abondant appareil surnaturel – les oiseaux qui tournent en rond, les vêtements en peau humaine, les transformations et les rituels murmurés – se cache un drame politique. Dans un coin, nous avons la Recta Provincia, représentée par la présence imposante de Mateo, parlant par énigmes, tout comme les anciens fantastiques sont censés le faire. Malgré leur apparente violence, leur objectif est de rétablir un certain équilibre politique dans un pays qui leur a été cruellement arraché d'abord par les Espagnols, puis maintenant par les Allemands. Dans l’autre, les Allemands, représentés par l’hypocrite chrétien Stefan. Au milieu, le fouin Acevedo, qui est essentiellement du mastic entre les mains des Allemands et qui sera finalement contraint de repenser radicalement.
Pour l'essentiel, Murray, aidé par le superbe travail de caméra de Maria Secco qui exploite tout le potentiel atmosphérique de Chiloé, fait du bon travail en nous attirant dans ce monde étrange. Visuellement,Sorcellerieest toujours terriblement sombre et délicieux. Mais après le procès surréaliste de Mateo et de son équipe, la tension s'apaise alors que l'élément surnaturel de forme libre est mis au premier plan et que les événements s'accumulent trop rapidement pour paraître crédibles. Les choses deviennent trop dépendantes des visuels symboliques et de la partition atonale effrayante mais galvaudée de Leonardo Heiblum.
Rosa, initialement silencieuse et incompréhensible, est au cœur de tout cela, entreprenant un voyage traumatisant d'humble servante à guerrière de la justice. Le jeune Veliz Caileo livre une performance sobre et physiquement exigeante dans laquelle la flamme de l'injustice de Rosa est malheureusement rarement visible à la surface, le spectateur ne pouvant accéder à son monde intérieur. Elle reste cependant une présence sympathique et dont la vision innocente du monde fonde cette incroyable histoire.
Sociétés de production : Fabula, Match Factory Productions, Pimienta Films
Ventes internationales : The Match Factory [email protected]
Producteurs : Nicolas Celis, Rocio Jadue, Juan de Dios Larrain, Pablo Larrain
Scénario : Christopher Murray, Pablo Paredes
Photographie : Maria Secco
Scénographie : Bernadita Baeza
Montage : Paloma López
Musique : Leonardo Heiblum
Acteurs principaux : Valentina Veliz Caileo, Daniel Antivilo, Sebastian Hulk, Daniel Munoz, Francisco Nunez