Réal. Sonia Kennebeck. États-Unis, 2016, 96 minutes
Le premier long métrage documentaire de Sonia Kennebeck est, comme prévu et présenté, un réquisitoire contre le programme américain de drones en Afghanistan à travers le témoignage de trois lanceurs d'alerte militaires. Il ne s'intéresse pas aux excuses ou aux justifications. Il ne s’agit en aucun cas non plus d’un examen exhaustif de ce tueur moderne. Pourtant, la colère n’est pas l’émotion dominante ici. C'est de la tristesse, alors que ces individus brisés font face à leur culpabilité individuelle dans une machine à tuer à longue distance qui est à la fois inhumaine et inhumaine.
Il va presque sans dire que Kennebeck et ses témoins ont été contraints d'affronter des forces tout-puissantes pour produire ce message.
Kennebeck, dont la photo a été réalisée par Wim Wenders et Errol Morris, aimerait demander des comptes aux autorités américaines ;Oiseau nationalmontre qu’il y a effectivement un horrible règlement de compte, mais il vient principalement de l’intérieur. C'est un film personnel sur la culpabilité.
Oiseau nationalcela ressemble à une autre pièce du puzzle d’une Amérique brisée. Les États-Unis ne sont cependant en aucun cas le seul pays à s’engager dans une guerre de drones, et le fait que ce sujet ne soit pas abordé ici oriente son argument vers l’agenda national (les États-Unis, le Royaume-Uni, le Pakistan et Israël se livrent à une guerre de drones, avec de nombreux plus de pays font la queue pour participer).
Soutenu en partie par le NDR allemand (et coproduit par ITVS),Oiseau nationalsortira sur PBS aux États-Unis ; les festivals internationaux auront à cœur de le programmer, encouragés par ses mécènes de renom.
Kennebeck associe le témoignage de ses trois lanceurs d'alerte avec des images tournées en Afghanistan des survivants de la célèbre attaque de drone du 21 février 2010, au cours de laquelle 23 civils innocents ont été tués. Heather est peut-être la plus frappante, une jeune fille (maintenant serveuse et masseuse) qui voulait quitter la Pennsylvanie et parcourir le monde. Encouragée par des annonces de recrutement qui ressemblaient à un jeu vidéo, elle a rejoint l'armée de l'air, sans se rendre compte que « l'une des seules options de voyage est l'Afghanistan ». Elle est devenue analyste en imagerie de drones ; même si elle n’a jamais appuyé sur la gâchette. Heather a été chargée d'identifier des cibles parmi les « fourmis » au sol.
Aujourd'hui, Heather ne va clairement pas bien : « Elle entend des choses, voit des choses », dit sa mère. Elle est paralysée par la culpabilité et a du mal à faire accepter à l'armée qu'elle souffre du SSPT, même si elle n'a jamais mis les pieds sur le terrain.
Lisa, qui est plus âgée, « a perdu mon humanité en travaillant sur le programme de drones ». Elle se rend en Afghanistan pour distribuer des graines et tenter de trouver le pardon. Daniel est un activiste faisant l'objet d'une enquête du FBI ; il est aussi mentalement fragile. Il y a une horrible ironie dans le fait que même trouver un psychiatre ayant une autorisation de sécurité pour les soigner est presque impossible. Kennebeck associe leur culpabilité à la douleur des survivants afghans. Son documentaire illustre clairement comment même un meurtre contrôlé à distance et sanctionné par l’État peut détruire l’âme de toute personne impliquée. Ses arguments sur le contrôle et la responsabilité du programme de drones sont également convaincants, la dernière déclaration de Lisa s'avérant être le véritable point fort du film.
Il va presque sans dire que Kennebeck et ses témoins ont été contraints de se mesurer aux forces toutes-puissantes pour produire cela, comme l’ont fait tous les lanceurs d’alerte qui ont affronté l’armée américaine. Légalement, ils sont paralysés dans ce qu’ils peuvent dire, et la véritable ampleur du programme de drones est inconnue, et les chiffres sont invérifiables. L'omission de mentionner les frappes de drones qui, si elles ne sont pas « légitimes », sont en deçà des atrocités du 21 février, cependant, nuit au film. Le meurtre de Jihadi John, par exemple, est une zone grise et une incursion dans cette zone aurait pu aider.Oiseau national's crédibilité globale.
Kennebeck fait valoir ses arguments et ce film est particulièrement bien monté. De belles images aériennes du directeur de la photographie Torsten Lapp (via un hélicoptère et, oui, un drone) renforcent le fait que nous ne sommes tous que de simples points vus du ciel. Des mouvements mécaniques et grognants accompagnent la voix off de Heather alors qu'elle explique comment le programme de drones sans frontières est « omniscient dans la vie des gens » ; si grande, en effet, qu'elle est actuellement sous-traitée à des sociétés privées.
Ventes internationales : ro*co films international, [email protected] (ventes US, Submarine, [email protected])
Producteur : Inès Hofmann Kanna
Producteurs exécutifs : Wim Wenders, Errol Morris
Photographie : Torsten Lapp
Editeur : Maxine Goedicke
Musique : Mais Rudolph
Chanson titre :Oiseau national,par Sole et DJ Pain 1.