« Marighella » : revue berlinoise

Un appel aux armes cinétique du premier réalisateur brésilien Wagner Moura, avec Seu Jorge en tête

Réal. Wagner Moura. Brésil. 2019. 155 minutes.

Drame brésilienMarighellaest un film urgent par son engagement et son intensité cinématographique, et il ne pourrait guère être plus opportun. Alors que le Brésil fait face à un nouveau gouvernement d'extrême droite dirigé par Jair Bolsonaro, le biopic politique de Wagner Moura revient sur la dictature qui a soumis le pays il y a quelques décennies à peine et demande à son public de réfléchir au rôle que les militants rebelles pourraient jouer dans un avenir proche. .

L'intensité du thriller de Marighella et le rôle principal convaincant du chanteur-acteur Seu Jorge fourniront une influence internationale au cinéma d'art et d'essai.

Percutant à souhait, c'est le premier film de Moura, qui ? avant de jouer dans Netflix?Narcos? a été le protagoniste du lauréat de l'Ours d'Or de Berlin 2008 de José PadilhaEscouade d'élite. Moura a clairement appris du style sans faire de prisonniers de ce film, mais surtout,Marighella? ses producteurs, dontCité de Dieu?S'agit-il de Fernando Meireilles ? apparaît comme un exercice réfléchi mais très chargé dans la lignée du docudrame de Pontecorvo.La bataille d'Alger. À une époque de colère,Marighelladevrait alimenter le débat du festival sur la nature et l'effet du militantisme politique, tandis que son intensité de thriller et le rôle principal convaincant du chanteur-acteur Seu Jorge fourniront une influence internationale au cinéma d'art et d'essai.

Le film commence par des légendes qui nous renseignent sur la dictature militaire du Brésil, qui débute en 1964 avec uncoup d?étatet une suspension des droits civils. On nous donne également une biographie miniature de Carlos Marighella, poète, membre du Congrès, descendant d'esclaves africains et fondateur de l'Action de libération nationale, un groupe de résistance engagé dans la lutte armée contre le gouvernement. Il est également l'auteur de textes révolutionnaires dont, comme le montre une scène ultérieure, Jean-Paul Sartre a contribué à la promotion. La lutte anti-régime était soutenue par certaines factions, notamment les étudiants et l’Église, mais n’était pas encore adhérée par le grand public, et les tentatives pour gagner un tel soutien constituent ici un thème clé.

Les scènes d'ouverture, qui se déroulent à Sao Paolo en 1968, éclatent comme le tonnerre, alors que Marighella, déguisée en perruque, mène sa cellule dans un raid pour capturer des armes dans un train. Le film remonte ensuite quatre ans en arrière, à Rio, pour montrer Marighella profitant d'un temps libre avec son jeune fils Carlinhos, avant que les forces de sécurité ne lui tendent une embuscade dans un cinéma.

De retour à Sao Paolo, Marighella discute de stratégie et d'idéologie avec ses collègues, citant les luttes populaires à Cuba, en Algérie et au Vietnam comme modèles à suivre. Il y a d'autres séquences d'action à venir, filmées cinétiquement par Adrian Teijido, notamment un raid bancaire qui se termine par une fusillade. Mais une grande partie de l'action qui a suivi est consacrée à la poursuite des militants par l'inspecteur de police Lucio (Bruno Gagliasso), dépeint de manière quelque peu monotone comme l'ennemi juré de Marighella aux yeux glacials et vicieusement impitoyable : il incarne les pires excès d'un régime autoritaire. régime, comme en témoigne la brutalisation des frères qui comptent parmi les alliés de Marighella. Il y a aussi une scène formidable dans laquelle un rédacteur en chef de journal publie une émission de radio de Marighella, signant ainsi calmement et en connaissance de cause sa propre condamnation à mort.

Le film dépeint parfois son héros comme une figure totémique plus grande que nature : comme dans son regard ardent vers la caméra, en très gros plan. Votre Jorge ? l'acteur et chanteur surtout connu sur les écrans internationaux pour ses intermèdes Bowie-goes-bossa dansLa vie aquatique? a certainement une présence convaincante avec autorité, avec son énergie physique palpable et sa voix grave et tonitruante. Mais le film apporte également des nuances à Marighella, soulignant son caractère de père de famille dévoué, dans ses conversations avec sa femme et compagne d'armes Clara (Adriana Esteves) et dans les lettres enregistrées à son fils, entendues par intermittence en voix off. C'est aussi un farceur sympathique : à un moment donné, il convainc un frère nerveux (Henrique Vieira) qu'il devra aider la cause en couchant avec la femme d'un colonel qui a un faible pour les Dominicains.

Il y a un fort soutien de la part des acteurs qui incarnent les révolutionnaires : parmi eux, Bella Camero dans le rôle de l'acolyte idéologue-stratège de Marighella, et Humberto Carrao dans le rôle du véritable tison du groupe. En suivant les changements de position de Marighella, depuis l'adoption d'une approche hardcore œil pour œil jusqu'à ses tentatives de persuader ses camarades qu'il est temps de se retenir, le film minimise quelque peu la propre responsabilité de Marighella dans la violence, suggérant que ce sont ses jeunes camarades qui sont les vrais partisans de la ligne dure. C'est une façon de faire de Marighella un héros sympathique et admirable tout en suspendant quelque peu l'interrogation sur la valeur de l'action armée.

Il s’agit cependant essentiellement d’un biopic d’action plutôt que d’un film de débat politique. Néanmoins, une image du générique de fin de la cellule de guérilla rugissant avec une intention militante suggère queMarighellapeut tout à fait être vu, au sens propre ou figuré, comme un appel aux armes.

Sociétés de production : O2 Filmes, Globo Filmes, Maria da Fé

Ventes internationales : Elle Driver,[email protected]

Producteurs : Bel Berlinck, Andrea Barata Ribeiro, Wagner Moura, Fernando Meirelles

Scénario : Felipe Braga, Wagner Moura

Photographie : Adrian Teijido

Editeur : Lucas Gonzaga

Conception et réalisation : Frederico Pinto

Musique : Antonio Pinto

Acteurs principaux : Seu Jorge, Adriana Esteves, Ana Paula Bouzas, Bruno Gagliasso, Bella Camero