Gérard Depardieu dirige une excellente distribution dans la version de Patrice Leconte du détective français classique
Réal : Patrice Leconte. France-Belgique. 2022. 86 minutes
DansMaigret, Patrice Leconte livre un portrait merveilleusement atmosphérique et délicieusement mélancolique de l'inspecteur de police titulaire alors qu'il tente d'identifier une jeune victime d'un meurtre dans le Paris des années 1950. A la recherche d'un mobile possible, Maigret s'efforce de mettre un nom sur un orphelin de province d'« à peine » 20 ans retrouvé mort dans une robe de créateur que cinq coups de couteau ont fait passer des reflets argentés au rouge sanglant. L'ensemble du casting est excellent dans tous les domaines, avec Gérard Depardieu comme centre de gravité méthodique et toujours observateur dans une affaire tentaculaire qui semble signifier plus pour l'inspecteur en chef que ce qui est habituel pour un homme dans son domaine de travail.
Ce qui est à l'écran est une narration à l'ancienne dans la meilleure tradition possible
Depardieu rejoint une liste impressionnante de stars françaises et britanniques endossant ce rôle, à commencer par la première année bien remplie du personnage au cinéma en 1932, où Pierre Renoir joua dans le film de son frère Jean.Nuit à la croisée des chemins,la même année où Abel Tarride joue dans le film de son fils JeanLe chien jaune.Albert Préjean, Jean Gabin, Heinz Rühmann, Charles Laughton comme premier Maigret de langue anglaise enL'homme sur la tour Eiffel(1950), Michael Gambon dans les années 1990 et Rowan Atkinson, dans la série télévisée britannique de 2016, ont également enfilé le chapeau et le trench-coat emblématiques. Le Maigret de Depardieu est solide dans tous les sens du terme. Il va au fond des choses, même si le fond est assez profond.
L'attention portée aux détails par Leconte s'accorde parfaitement avec le style d'investigation de Maigret. La motivation du réalisateur chevronné est de divertir, ce qu'il fait assurément, avec empathie et flair, en moins de 90 minutes. SND sort la dernière aventure du célèbre inspecteur en France le 23 février et a déjà assuré une distribution dans plusieurs territoires européens, notamment en Suisse, en Autriche, en Espagne et en Allemagne, ainsi qu'en Australie et en Nouvelle-Zélande.
Le film commence au cabinet du médecin de Maigret. Maigret est fatigué – jusqu'aux os – et a perdu l'appétit. Le médecin dit qu'il devrait envisager de se reposer, voire de prendre une retraite anticipée. Et il doit arrêter de fumer. Maigret continue de porter une pipe vide, ce qui mène au seul gag manifeste et éclatant de rire du film. Il y a une beauté stoïque dans les méthodes de Maigret. Il ne juge pas au fur et à mesure – il reste à l’écoute, fait les démarches. (Parviendra-t-il à monter 6 étages jusqu'à l'endroit où la victime aurait pu habiter ?) L'ingéniosité, l'expérience, les pouvoirs d'observation et de déduction rapportent peu à peu leur salaire. Pour des raisons subtiles, cette affaire particulière redonne goût à la vie au détective.
Nous avons des mansardes d'époque, la morgue et une autopsie, un récit vivant de la façon dont la cruauté envers les canards les rend beaucoup plus savoureux à manger, une concierge qui inspecte son domaine tout en sachant que les jeunes femmes naïves qui arrivent sans amis à Paris sont interchangeables. Certains trouvent du travail ou un mari ; d'autres trouvent que venir dans la capitale a été une erreur mortelle. Une grande partie de l’histoire repose sur le fait qu’il fut un temps où la façon dont un individu s’habillait pouvait être aussi révélatrice que les échantillons d’ADN modernes. Maigret se lie d'amitié platonique avec l'une d'elles, une jeune femme consciente d'elle-même, Betty (Jade Labeste). Aurore Clément incarne parfaitement une veuve aristocratique qui raffole de son fils, Laurent (Pierre Moure) qui est fiancé à Jeanine (Mélanie Bernier), une jeune actrice pleine de vivacité plusieurs positions sociales en dessous de lui. Le droit factuel de certains suspects probables est intemporel. Les connotations sexuelles vont du clandestin au semi-effronté.
Leconte, qui a débuté comme dessinateur et illustrateur de bande dessinée, aime les gros plans serrés mais propose des cadrages plus larges avec une assurance tranquillement passionnante. Le chef opérateur Yves Angelo sculpte la lumière et Bruno Coulais a concocté une partition un peu troublante.
Il y aura certainement des spectateurs qui bâilleront devant l'artisanat à l'ancienne aux teintes ambrées exposé dansMaigret. Mais ce qui est à l'écran est une narration à l'ancienne dans la meilleure tradition possible, rendue pertinente par des thèmes de privilège, de classe, de pouvoir, d'aspiration et de loyauté tenace qui ne disparaîtront pas de sitôt.
L'auteur belge Georges Simenon, qui a abandonné l'école à 15 ans, a accompli beaucoup de choses. Sa production littéraire phénoménale totalisant des centaines de volumes comprend 75 romans et 28 nouvelles mettant en vedetteMaigret. (Leconte lui-même a déjà adapté une œuvre de Simenon dans les années 1989.Monsieur Hire.) Espérons que ce soit le début d'un MCU – Maigret Cinematic Undertaking – pour les téléspectateurs en quête de motivations humaines mijotant dans un monde reconnaissable.
Production Companies: F Comme Film, Ciné-@, SND, Scope Pictures
Ventes internationales : SND,[email protected]
Producer: Jean-Louis Livi, Philippe Carcassonne
Screenplay: Jérome Tonnerre, Patrice Leconte, based on “Maigret et la Jeune Morte” by Georges Simenon
Production Design: Loïc Chavanon
Montage : Joëlle Hache
Photographie : Yves Angelo
Musique : Bruno Coulais
Main cast: Gérard Depardieu, Jade Labeste, Mélanie Bernier, Aurore Clément, André Wilms, Pierre Moure, Anne Loiret, Clara Antoons