Des frères et sœurs adolescents tentent de faire face à leur mère alcoolique dans ce conte saisissant sur le passage à l'âge adulte venu de Belgique
Réal/scr : Paloma Sermon-Dai. Belgique. 2022. 82 minutes
Des frères et sœurs adolescents tentent de relever les défis d'une vie familiale fracturée et d'un avenir incertain dans le premier long métrage de fiction de la réalisatrice belge Paloma Sermon-Dai. Combinant un « été dernier » familier ? Histoire de passage à l'âge adulte avec une sensibilité non-fictionnelle à l'affect saisissant, le style visuel intime du cinéaste attire efficacement le spectateur dans le monde clos des protagonistes troublés de ce titre de la Semaine de la Critique cannoise.
Combine un familier « l'été dernier ? histoire de passage à l'âge adulte avec une sensibilité non-fictionnelle à l'affect saisissant
Ce look distinctif, ainsi que deux performances centrales convaincantes des frères et sœurs réels Purdey et Makenzy Lombet (qui figuraient dans le court métrage documentaire de Sermon-Dai en 2017Makenzy,et utilisent ici leurs propres noms), devraient certainement contribuer à attirer davantage l'attention sur ce film tranquille, déjà acquis pour la France par Condor.
Tant par le lieu que par ses personnages, le film se déroule dans la province wallonne de Belgique ? un haut lieu du tourisme, mais en proie au chômage et à la pauvreté. Alors que Purdey, 17 ans, et son frère Makenzy (Mak en abrégé), 15 ans, profitent fréquemment du lac local, barbotant dans ses eaux ou se détendant sur ses rives, la région ne leur réserve pas grand-chose d'autre. Vivre dans la vieille maison qui fuit de leur grand-mère ? d'où le titre du film ? ils arrivent à la conclusion troublante que leur mère alcoolique et souvent absente (Louise Manteau) est incapable de leur apporter quoi que ce soit en termes de confort ou de sécurité.
La même chose peut être dite pour la maison délabrée, avec ses murs ocre écaillés qui suggèrent une maison autrefois chaleureuse et heureuse, en train de disparaître. Le directeur de la photographie Frédéric Noirhomme contraste l'intérieur sombre et délabré avec le soleil brûlant de l'été. Cadrage serré et éclairage intérieur oppressant parlant d'une situation domestique qui n'est pas un sanctuaire mais une meule autour du cou de ces adolescents. Pourtant, Makenzy reste émotionnellement attaché à la fois à la propriété et à sa mère, désespéré que les choses changent mais incapable de rivaliser avec sa dépendance.
À l'approche de son 18e anniversaire et de la prétendue liberté de l'âge adulte, Purdey se retrouve à devoir choisir entre poursuivre son rêve de devenir infirmière ou accepter un travail de ménage subalterne qui lui permettra de subvenir à ses besoins et à ceux de son frère. Mais en réalité, il n’y a pas de choix ; Purdey est forcément mature au-delà de son âge et fera ce qu'il faut pour sa famille. Son petit ami aisé Youssef (Amine Habidou) ne comprend pas pourquoi elle n'a pas le monde à ses pieds. Mais le drame du scénario économique de Sermon-Dai ne réside pas dans une quelconque injure contre les injustices de la vie, mais dans l'acceptation tranquille et le stoïcisme de ceux qui sont confrontés aux luttes quotidiennes.
Sermon-Dai a déjà remporté le prix Magritte du meilleur documentaire de 2020Petite Samediqui a été créée au Forum de Berlin et explorait la relation entre sa propre mère et son frère toxicomane. Un ton similaire dans le monde réel informeIl pleut dans la maison, aidé par le casting d'(excellents) acteurs frères dans les rôles centraux et la dynamique qui en résulte ? parfois attentionné, parfois combatif, mais toujours empreint de tendresse. Les choix artisanaux approfondissent également le réalisme de la pièce, Sermon-Dai démontrant un style d'observation détendu.
En tant que tel, il n’y a pas de partition à proprement parler, mais plutôt un paysage sonore naturel immersif et superposé ? pluie sur les fenêtres, tonnerre lointain, tongs claquant sur une route poussiéreuse. Le montage, de Thijs Van Duffel, est fluide mais sans hâte, coupant les moments de forte émotion et s'attardant sur des moments apparemment anodins qui deviennent de plus en plus poignants sous le regard inébranlable de la caméra. Purdey nettoie les fenêtres des appartements de vacances, entouré par les bruits de familles de touristes heureuses ; Mackenzie retient ses larmes pendant qu'il joue à des jeux vidéo, sa mâchoire serrée soulignée par la lueur bleue fantomatique de la télévision. Ces moments exposent non seulement la vie intérieure de ces personnages, mais font de Sermon-Dai un cinéaste doté d'une solide compréhension du médium.
Société de production : Michigan Films
Ventes internationales : Heretic [email protected]
Producteurs : Sébastien Andrés, Alice Lemaire
Photographie : Frédéric Noirhomme
Scénographie : Ladys Oliveira Silva
Montage : Thijs Van Duffel
Main cast: Purdey Lombet, Makenzy Lombet, Donovan Nizet, Louise Manteau, Amine Habidou