« Riposte féministe » : Revue de Cannes

Un documentaire engagé et fougueux qui suit une nouvelle vague de militantes féministes à travers la France

Dir: Marie Perennès, Simon Depardon. France. 2022. 88 mins

Sous le couvert de la nuit, de petits groupes de femmes descendent dans les rues des villes de France. Equipés de seaux de colle et de feuilles de papier blanc portant des lettres peintes en noir, ils se réapproprient les espaces publics qui, comme le dit une femme, sont le domaine de l'homme blanc cis. Elles sont membres de collectifs de collages féministes, de groupes de militantes qui collent des messages, des slogans percutants et des hommages aux victimes de féminicide. Ce documentaire plein d'entrain suit les membres en action et écoute leurs pensées et leurs espoirs concernant la nouvelle vague d'activisme féministe.

Un cinéma engagé, curieux, qui trouve aussi bien l'humour que la colère

Le risque avec les films sur un mouvement politique est que l'approche, comme le contenu, puisse être autoritaire et aride. Heureusement, il s'agit d'un cinéma engagé, curieux, qui trouve aussi bien l'humour que la colère ; qui équilibre la rhétorique avec des moments d’énergie joyeuse et fédératrice. Le film, premier long métrage de Marie Perennès et deuxième de son co-réalisateur Simon Depardon, devrait être apprécié dans d'autres festivals et événements dédiés aux femmes. Si l’on en croit la réponse vocale et enthousiaste à sa première à Cannes, il s’avérera probablement un plaisir passionnant et stimulant pour le public.

Le film s'ouvre sur une séquence mémorable à Lyon. Lors d'un rassemblement, un grand groupe de militants se rassemble en chantant et en dansant dans la rue, sous le regard amusé de quelques skateurs locaux. Soudain, il y a ce qui ressemble à une explosion : la police a tiré une grenade fumigène sur la manifestation pacifique. Presque d’une seule voix, les femmes lèvent le poing et scandent : « Nous sommes toutes antifascistes ». C'est un moment saisissant, qui capture à la fois le pouvoir passionnant des femmes unies et leur vulnérabilité dans les rues où elles transmettent leur message aux masses.

L'approche du film est simple, mais efficace. Dans une série de lieux à travers le pays – Le Havre, Marseille, Paris, Brest, Montbrison et d'autres – les cinéastes suivent les femmes alors qu'elles affichent sur les murs et les fenêtres. Ensuite, ils s'assoient avec les femmes et les écoutent débattre et partager leur propre parcours vers l'activisme féministe. Il y a des moments de comédie dans les séquences nocturnes de rue – de la colle renversée, une poubelle en équilibre précaire – et des incidents dans lesquels il y a un sentiment de danger réel et immédiat. Les messages ont tendance à être concis et précis : « Ta main sur mes fesses, mon poing sur ton visage » lit-on. « Même mon chien comprend quand je lui dis non » en est une autre. D’autres sont plus ouvertement menaçants : « Le patriarcat est violent. Sa chute le sera aussi » ; « Empalons tous les mâles ».

Mais alors que le concept de violence comme forme de protestation est débattu, ce qui semble être un thème fédérateur est l'autonomisation qui résulte de l'acte de se rassembler et de revendiquer les espaces où des générations d'hommes – issus de la sous-culture machiste des graffitis, jusqu'aux personnalités de l'establishment qui prêtent leur nom aux rues et aux places – ont pris l'habitude de marquer leur territoire « comme des chiens ».

Production Company: Palmeraie et Désert, France 2 Cinéma

Ventes internationales : Wild Bunch International,[email protected]

Productrice : Claudine Nougaret

Cinematography: Simon Depardon

Montage : Nassim Gordji Tehrani

Musique : Uèle Lamore