Le président français Emmanuel Macron a annoncé dimanche que la France allait probablement retirer à Harvey Weinstein sa Légion d'honneur, à la suite de multiples accusations de viol et d'agression sexuelle contre l'ancien magnat du cinéma hollywoodien.
Weinstein a reçu cet honneur – la plus haute distinction française pour le mérite militaire et civil – à l'Elysée en 2012 par le président de l'époque, Nicolas Sarkozy, après le triomphe multi-Oscar du film de Michel Hazanavicius.L'artiste, que Weinstein a aidé à concevoir.
Macron a été interrogé sur l'affaire Weinstein lors de sa première interview télévisée en direct depuis son élection en mai.
"Oui, j'ai pris des mesures pour révoquer la Légion d'honneur", a déclaré Macron. « En tout cas, j'ai demandé au grand chancelier de l'Ordre d'engager une procédure disciplinaire. C’est lui qui prendra la décision.
Weinstein fait partie d'une longue lignée de personnalités du cinéma américain à recevoir la Légion d'honneur aux côtés de Kirk Douglas, Clint Eastwood, David Lynch, Arnold Schwarzenegger, Martin Scorsese et Steven Spielberg.
L'annonce de Macron intervient alors que se multiplient les accusations de viol et d'agression sexuelle de la part d'actrices et de professionnels du cinéma du monde entier contre Weinstein.
Au Royaume-Uni, la police métropolitaine de Londres a déclaré samedi dans un communiqué qu'elle enquêtait sur cinq allégations d'agression sexuelle par trois femmes contre le producteur et exécutif en disgrâce.
La France est également impliquée dans cette affaire. Dans unéditorial dansLe GardienMercredi, l'actrice Léa Seydoux a raconté comment Weinstein s'était jeté sur elle et avait tenté de l'embrasser lors d'une réunion à Paris.
Les révélations de Weinstein ont également incité l’industrie cinématographique française à s’intéresser de près à sa propre politique sexuelle. Dans le même éditorial, Seydoux évoque trois autres occasions où des réalisateurs ont tenté de s'imposer à elle alors qu'elle était une jeune actrice d'une vingtaine d'années. Au moins deux d’entre eux seraient issus du monde cinématographique français. « Si vous êtes une femme qui travaille dans ce milieu, vous devez vous battre car c'est un monde très misogyne », écrit-elle.
Dans un éditorial du Journal du dimanche françaisLe Journal du Dimanche, l’actrice Isabelle Adjani a accusé l’industrie cinématographique française d’être également complice d’un système prédateur dans lequel les actrices étaient censées « donner un peu d’elles-mêmes en échange de beaucoup en retour ».
« La France est tout aussi glissante », a écrit Adjani. « En France, il y a trois G : galanterie, grivoiserie, goujaterie (galanterie, impertinence et grossièreté)… Glisser de l'un à l'autre jusqu'à la violence sous prétexte que c'est un jeu de séduction est une des armes des prédateurs et harceleurs. »
Les implications des révélations de Weinstein se sont également propagées au-delà du monde du cinéma. Dans le cadre d'une initiative connexe, Sandra Muller, rédactrice fondatrice du bulletin d'information professionnel de la télévision françaiseLa lettre de l’audiovisuel, a créé le hashtag #balancetonporc, qui se traduit par #denounceyourpig, appelant les victimes de harcèlement sexuel à dénoncer « leurs bourreaux ».
Elle a lancé la campagne avec deux dénonciations à l'encontre de hauts dirigeants de la télévision. L’initiative, toujours en cours, a suscité 60 000 tweets en l’espace de deux jours.